L'Intérêt feul fut le Dieu de la Terre:
Il fit la paix, il déclara la guerre ; Pour fe détruire arma tous les mortels, Et des Dieux même attaqua les autels. Pour mieux encore établir fon Empire, Morofophie inventa l'art d'écrire, Des longs procès inftrument éternel, Et du Menfonge organe criminel, Par qui la Fraude, en prestiges fertile, Seme en tous lieux fa doctrine fubtile, Et chez le Peuple, ami de nouveautés, Change en erreur toutes les verités. Mille autres arts encore plus déteftables Furent le fruit de fes foins rédoutables; Et d'eux naquit à fes ordres foumis Le plus mortel de tous nos ennemis, Le Luxe, ami de l'oifive molleffe, Qui parmi nous fignalant fa fouplesse, Introduifit par cent divers canaux La pauvreté, le plus dur de nos maux. Ainfi l'aimable et divine Harmonie De tous les coeurs par dégrés fut bannie: Mais en partant pour remonter aux Cieux Elle voulut, dans fes derniers adieux, De fa bonté pour la race mortelle Laiffer encore une marque nouvelle.
Si vos efprits étoient moins prévenus, Et fi vos maux vous étoient mieux connus, J'aurois, dit-elle, encor quelque éfpérance De réuffir à votre délivrance.
Mais la Difcorde, éblouiffant vos yeux, Vous a rendu fon joug trop précieux, Pour me flatter, que vos clartés premières Puiffent renaître à mes foibles lumières, Et préfumer qu'une feconde fois L'affreux Chaos fe débrouille à ma voix, Pour être heureux vous reçutes la vie, Et ce bonheur fit ma plus chere envie.
3.B. Rouf Aux Immortels j'ofai ravir pour vous Ce feu du Ciel, dont ils font fi jaloux, Cette raifon, dont la fplendeur divine Vous fait fentir votre vraie origine. Qu'avez-vous fait d'un partage fi doux? C'eft elle, hélas! qui vous a perdu tous. Par votre orgueil corrompue, alterée, Dans votre coeur elle a donné l'entrée Aux vanités, aux folles vifions, Germe éternel de vos divifions; Et s'échappant du cercle des idées A vos befoins par les Dieux accordées, Elle a porté fes regards élevés
Jusqu'aux fecrets pour eux feuls refervés. Funefte effor, maiheureuse chimere, Qui vous ravale au-deffous de la sphere Des animaux les plus défectueux: D'autant plus vils, que plus préfomptueux. Vous ne fuivez, au lieu de la Nature, Qu'une ombre vaine, une faufle peinture; Et qu'à vos yeux trompés par cet écueil, Votre mifére eft un fujet d'orgueil. Adieu. Je pars, de vos coeurs exilée Et fans éfpoir de m'y voir rappellée, Mais ma pitié ne peut vous voir périr; Et fi mes foins n'ont pû vous fecourir, Si mon pouvoir fur tout ce qui respire N'a pû fur vous conferver fon empire, Pour vous du moins j'entrétiendrai toujours L'ordre conftant et l'immuable cours, Qu'à l'Univers, en lui donnant naissance, Sçut impofer ma fuprême puiffance. Vous jouirez toujours par mes bienfaits De tous les dons que le Ciel vous a faits; Et cette Terre, à vos voeux fi facile, Sera pour vous un éternel azile, Jusqu'au moment prévû par vos Ayeux, Qui confondra la Terre avec les Cieux, Lorsque la flâme en ravages féconde, Viendra fapper les murailles du Monde,
(Man erråth bald, daß Makare in folgender Allegorie die Glückseligkeit und Theleme den Willen, oder die Bez gierde bedeute. Ihr Hauptzweck läuft auf das so wahre: Bene qui latuit, bene vixit! beim Horaz hinaus.)
Thélème eft vive, elle est brillante, Mais elle eft bien impatiente; Son oeil eft toujours éblouï,
Et fon coeur toujours la tourmente. Elle aimait un gros réjouï D'une humeur toute différente. Sur fon vifage épanouï • Eft la férénité touchante; Il écarte à la fois l'ennui, Et la vivacité bruyante.
Rien n'eft plus doux que fon fommeil, Rien n'eft plus beau que fon réveil; Le long du jour il vous enchante. Macare eft le nom qu'il portait. Sa maitreffe inconfidérée
Par trop de foins le tourmentait ; Elle voulait être adorée. En reproches elle éclata: Macare en riant la quitta, Et la laiffa deféspérée. Elle courut etourdiment Chercher de contrée en contrée Son infidèle et cher amant, N'en pouvant vivre feparée.
Elle va d'abord à la cour. Auriez-vous vû mon cher amour? N'avez-vous point chez vous Macare? Tous les railleurs de ce féjour
Sourirent à ce nom bizare.
Comment ce Macare eft-il fait?
Où l'avez-vous perdu, ma bonne ? Faites-nous un peu fon portrait, Ce Macare qui m'abandonne, Dit-elle, eft un homme parfait, Qui n'a jamais haï perfonne, Qui de perfonne n'est haï, Qui de bon fens toujours raifonne, Et qui n eut jamais de fouci. A tout le monde il a fçu plaire.
On lui dit: Ce n'eft pas ici Que vous trouverez vôtre affaire, Et les gens de ce caractère, Ne vont pas dans ce pays-ci.
Thélème marcha vers la ville. D'abord elle trouve un couvent, Et penfe dans ce lieu tranquille Rencontrer fon tranquille amant, Le fous-prieur lui dit, Madame, Nous avons long-tems attendu Ce bel objet de votre flamme, Et nous ne l'avons jamais vû. Mais nous avons en récompenfe Des vigiles, du tems perdu, Et la difcorde, et l'abftinence. Lors un petit moine tondų Dit à la dame vagabonde; Ceffez de courir à la ronde Après votre amant échapé; Car fi l'on ne m'a pas trompé,
Ce bon homme eft dans l'autre monde.
A ce difcours impertinent Thélème fe mit en colère: Apprenez, dit-elle, mon frère, Que celui qui fait mon tourment Eft né pour moi, quoi qu'on en dife;
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