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La Motte

1

Au gré de ce nouvel Esope 10)
Les animaux prennent la voix,
Sous leurs difcours il enveloppe
Des leçons même pour les Rois.
Une douceur fimple, élégante,
En criant, par-tout y présente
La nature et la vérité

De quelle grace il les anime!
Oui, peut être que le sublime
Cède à cette naïveté.

Ici du Cenfeur du Parnaffe
Je ne crains point d'être repris. 11)
Au poids, dont se servoit Horace
Il fçait pefer tous les écrits;
Il connoît, Critique équitable,
Quel eft l'ornement convenable
Que chaque Auteur doit employer;
Et toi-même, fils de Latone,
Dans les préceptes qu'il nous donne,
Tu ne trouves rien à rayer.

Quel agrément, quelle harmonie
Dans ces écrits ingénieux,
Où l'hyperbole et l'ironie
Difputent à qui plaira mieux! 12)
Ces difcours privés qu'on l'adresse
Tributs d'eftime et de tendreffe,
Y brillent des plus heureux traits
Par une feconde préfence,

C'est ainsi qu'en trompant l'abfence,
On en fufpendoit les regrêts.

Les Vers, les éloquens ouvrages
M'enyvroient de leur doux poison:
J'en oubliois presque les fages
Amis de l'exacte raison. 13)

Sur mille erreurs, fruits de l'enfance,
Sur la nature et fa puiffance

10) La Fontaine. 11) Boileau.

Ils

12) Lettres de Balzac et de Voiture. 13) Les Philofophes.

Ils f'efforcent d'ouvrir nos yeux
Et tel d'entr'eux, avec les Graces, 14)
Nous fait parcourir fur fes traces
Tout l'efpace effrayant des Cieux.

Long-tems l'Antiquité fçavante
Nous recela mille Ecrivains;
Mais des beautés qu'elle nous vante,
Nous avons lieu d'être auffi vains.
Les Plines et les Demofthènes,
Les travaux de Rome et d'Athènes
Deviennent nos propres travaux;
Et ceux qui nous les interprètent,
Sont moins, par l'éclat qu'ils leurs prêtent
Leurs traducteurs que leurs rivaux.

Après tant d'oeuvres renommées,
Dont notre fiécle est ennobli,
La langue qui les a formées
Peut-elle redouter l'oubli?
Non, fur cette langue cherie
L'ignorance et la barbarie
Ne verferont point leur poison,
Et tous les peuples, d'âge en âge,
Y respecteront l'affemblage
Des Graces et de la Raifon.

Vous que diftingue la naissance
Ou l'éclat d'un illuftre rang,
Soyez jaloux de la féance
Qu'ici le feul mérite prend.
Venez-y protéger Minerve;
Le prix qu'elle vous en réserve
Eft un nom vainqueur du trépas.
Loin les diftinctions ferviles:
Il est beau qu'avec les Virgiles
Se confondent les Mécénas.

14) Les Mondes de Fontenelle.

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J.B. Rouss feau.

J. B. Rousseau.

Es ist schon oben bemerkt worden, daß die Odenpoefie die größte Stärke dieses Dichters ist. Wenn indeß sein Feuer oft mehr lødert als glüht, wenn sein Ton nicht immer gleich neu, lebhaft und hinreissend ist, so scheint die Schuld mehr an seiner Sprache, als an dem beschränkten Maaße feines Talents zu liegen. Seine meisten Oden, und so auch die folgende, haben etwas Didaktisches, dem er aber durch die Lebhaftigkeit des Vortrages mehr lyrischen Anstrich, und größere Eindringlichkeit zu ertheilen weiß, als Lamotte, der jüngere Racine, u. a. die nicht selten in den förmlichen Lehrton herabsinken.

AUX ROIS SUR LEURS FLATTEURS.

Jadis tous les humains errans à l'avanture,

A leur fauvage inftina vivoient abandonnés,
Satisfaits d'affouvir de l'aveugle nature
Les befoins effrénés.

La raifon fléchiffant leurs humeurs indociles,
De la fociété vint former les liens,

Et bientôt raffembla fous de communs afyles
Les premiers Citoyens.

Pour affûrer entr'eux la paix et l'innocence,
Les Loix firent alors éclater leur pouvoir:
Sur des tables d'airain, l'audace et la licence
Apprirent leur devoir.

Mais il falloit encor pour étonner le crime,
Toujours contre les loix prompt à fe revolter,
Que des Chefs revêtus d'un pouvoir légitime
Les fiffent refpecter.

Ainfi pour le maintien de ces Loix falutaires,
Du peuple entre vos mains le pouvoir fut remis,
Rois, vous fûtes élus fages dépofitaires

Du glaive de Thémis.

Puiffe en vous la vertu faire luire fans cefle
De la Divinité les rayons glorieux;
Partagez ces tributs d'amour et de tendresse
Que nous offrons aux Dieux.

Mais chaffez loin de vous la baffe flatterie,
Qui cherchant à fouiller la bonté de vos moeurs,
Par cent détours obfcurs f'ouvre avec industrie
La porte de vos coeurs.

Le pauvre eft à couvert de fes rufes obliques:
Orgueilleufe, elle fuit la pourpre et les faifceaux,
Serpent contagieux, qui des fources publiques
Empoisonne les eaux.

Craignez que de fa voix les trompeufes délices
N'affoupiffent enfin votre frêle raison.
De cette Enchantereffe ofez, nouveaux Ulyffes,
Renverfer le poison.

Néméfis vous obferve, et frémit des blasphêmes
Dont rougit à vos yeux l'aimable vérité.
N'attirez point fur vous, trop épris de vous mêmes;
Sa terrible équité.

C'eft elle donc les yeux certains, inevitables,
Percent tous les replis de nos coeurs infenfés;
Et nous lui répondons des éloges coupables
Qui nous font adreffés.

Des châtimens du Ciel implacable miniftre,
De l'equité trahie elle venge les droits;
Et voici les arrêts dont fa bouche finiftre
Epouvante les Rois.

Ecoutez, et tremblez, Idoles de la Terre:
D'un encens ufurpé Jupiter eft jaloux.
Vos flatteurs dans fes mains allument le tonnere
Qui f'éléve fur nous.

Il détruira leur culte; il brifera l'image
A qui facrifioient ces faux adorateurs,

Et

J.B. Rou feau.

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