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Il ne faut pas perdre un moment; car un moment perdu engagera la campagne, et la campagne peut nous faire tomber dans une minorité funeste à l'état.

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E

MÉMOIRE

SUR

LA SOUVERAINETÉ DE CAMBRAI.

Je crois qu'il est de mon devoir de représenter au roi, avec le zele le plus sincere et avec le plus profond respect, des choses que j'ai pris autrefois la liberté de lui dire pour son service, sans aucun rapport à moi. Les grands bruits de paix très prochaine que les ennemis mêmes répandent dans toute l'Europe, me font penser, par zele pour sa majesté et pour le bien de l'église de Cambrai, à un article qu'il seroit très facile de faire insérer dans un traité de paix,

Voici de quoi il s'agit,

1o. Les empereurs d'Allemagne ont donné aux évêques de Cambrai la ville de Cambrai avec tout le Cambresis il y a près de sept cents ans. Alors le Cambresis étoit incomparablement plus étendu qu'il

ne l'est maintenant.

2o. Depuis ces anciennes donations, confirmées par les empereurs successeurs des premiers, les évêques de Cambrai ont toujours possédé la souverai

neté de Cambrai et du Cambresis, en qualité de princes de l'empire, comme les autres évêques souverains d'Allemagne.

3°. L'évêque de Cambrai avoit même dans les dietes de l'empire le rang devant celui de Liege. Il n'y a guere plus de soixante ans que ce rang étoit encore conservé, et que les députés de l'église de Cambrai alloient aux dietes.

4°. Il est vrai que les comtes de la Flandre impériale étoient avoués de l'église de Cambrai, et que les rois d'Espagne, qui ont été comtes de Flandre, ont voulu se servir du prétexte de cette avouerie pour établir leur autorité à Cambrai : mais il est clair comme le jour qu'un simple avoué d'une église n'y a aucune autorité que sous l'église même qu'il est obligé de défendre, et à laquelle il est subordonné. Il est vrai aussi que les rois de France, voyant Cambrai si voisin de Paris et si exposé aux invasions de leurs ennemis, voulurent, de leur côté, se faire châtelains des évêques pour avoir aussi un prétexte d'entrer dans le gouvernement de la ville : mais chacun sait que le châtelain de l'évêque, loin d'avoir une autorité au-dessus de lui, n'étoit en cette qualité que son officier et son vassal.

5°. Les choses étoient en cet état, quand CharlesQuint, craignant que les François ne s'emparassent

TOME III,

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de Cambrai, s'en empara lui-même, y bâtit une citadelle, et en donna le gouvernement à Philippe II, son fils, avec le titre de burgrave. Il fit cette disposition en qualité d'empereur, de qui l'évêque souverain de Cambrai relevoit. Les évêques du lieu ne laisserent pas de conserver leur souveraineté sur la ville et sur tout le pays, quoique Philippe eût un titre de défenseur de la citadelle.

6°. Dans la suite le duc d'Alençon, fils de France, étant venu dans les Pays-Bas avec le titre de duc de Brabant, se saisit de la citadelle de Cambrai par une intelligence secrete avec le baron d'Inchi qui y commandoit.

7°. Le duc d'Alençon ayant bientôt abandonné les ·Pays-Bas pour retourner en France, il laissa Balagni dans la citadelle : celui-ci exerça une cruelle tyrannie. sur la ville et sur le pays, où son nom est encore détesté.

8°. Le comte de Fuentes, général de l'armée d'Espagne, vint l'assiéger, et prit Cambrai sur lui.

9°. Jusques-là les Espagnols avoient laissé l'archevêque de Cambrai en possession paisible de tous les droits de souverain; mais comme Balagni l'en avoit dépouillé par pure violence pendant ces horribles. désordres, les Espagnols commencerent alors à faire comme Balagni, sur lequel ils avoient fait la con

quête; et ils se mirent en possession de la souveraineté sur tout le Cambresis, excepté sur la châtellenie du Câteau, qui est demeurée franche jusqu'au jour présent.

10°. D'ailleurs ils laisserent l'archevêque en liberté. de continuer à envoyer les députés de son église aux dietes impériales. On a continué à les y envoyer presque pendant tout le temps de la domination d'Espagne.

11°. Cependant les archevêques représentoient très fortement au conseil de conscience du roi d'Espagne qu'il ne pouvoit point, sans une très violente injustice, se maintenir dans une usurpation manifeste. Ils montroient leur titre et leur possession claire de plus de six cents ans de cette souveraineté. Ils ajoutoient que Balagni avoit été notoirement un tyran très odieux, et qu'une conquête faite par les Espagnols sur un homme qui n'avoit aucun droit ne pouvoit point avoir été faite justement au préjudice de l'église à qui cette souveraineté appartenoit avec évidence, et par conséquent que cette conquête faite sur un usurpateur étoit nulle à l'égard du possesseur légitime. :

12°. Le roi' d'Espagne Philippe IV, pressé par les fortes raisons que son conseil de conscience lui représenta, offrit enfin à l'archevêque de Cambrai dẹ, ce temps-là deux expédients pour le contenter.

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