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4. Le tribunal révolutionnaire est institué pour punir les ennemis du peuple.

5. Les ennemis du peuple sont ceux qui cherchent à anéantir la liberté publique, soit par la force, soit par la

ruse.

6. Sont réputés ennemis du peuple :

Ceux qui auront provoqué le rétablissement de la royauté, ou cherché à avilir ou à dissoudre la convention nationale et le gouvernement révolutionnaire et républicain dont elle est le centre;

Ceux qui auront trahi la république dans le commandement des places et des armées, ou dans toute autre fonction militaire, entretenu des intelligences avec les ennemis de la république, travaillé à faire manquer les approvisionnements ou le service des armées;

Ceux qui auront cherché à empêcher les approvisionnements de Paris, ou à causer la disette dans la république ;

Ceux qui auront secondé les projets des ennemis de la France, soit en favorisant la retraite et l'impunité des conspirateurs et de l'aristocratie, soit en persécutant et calomniant le patriotisme, soit en corrompant les mandataires du peuple, soit en abusant des principes de la révolution, des lois ou des mesures du gouvernement par des applications fausses et perfides;

Ceux qui auront trompé le peuple ou les représentants du peuple pour les induire à des démarches contraires aux intérêts de la liberté;

Ceux qui auront cherché à inspirer le découragement pour favoriser les entreprises des tyrans ligués contre la république ;

Ceux qui auront répandu de fausses nouvelles pour diviser ou pour troubler le peuple;

Ceux qui auront cherché à égarer l'opinion et à empêcher l'instruction du peuple, à dépraver les mœurs et à corrompre la conscience publique, et altérer l'énergie et la pureté des principes révolutionnaires et républicains, ou à en arrêter les progrès, soit par des écrits contre-révolu

tionnaires ou insidieux, soit par toute autre machination; Les fournisseurs de mauvaise foi, qui compromettent le salut de la république, et les dilapidateurs de la fortune publique, autres que ceux compris dans les dispositions de la loi du 7 frimaire ;

Ceux qui, étant chargés de fonctions publiques, en abusent pour servir les ennemis de la révolution, pour vexer les patriotes, pour opprimer le peuple;

Enfin tous ceux qui sont désignés dans les lois précédentes relatives à la punition des conspirateurs et contre-révolutionnaires, et qui, par quelque moyen que ce soit et de quelques dehors qu'ils se couvrent, auront attenté à la liberté, à l'unité, à la sûreté de la république, ou travaillé à en empêcher l'affermissement.

7. La peine portée contre tous les délits dont la connaissance appartient au tribunal révolutionnaire est la mort.

8. La preuve nécessaire pour condamner les ennemis du peuple est toute espèce de document, soit matérielle, soit morale, soit verbale, soit écrite, qui peut naturellement obtenir l'assentiment de tout esprit juste et raisonnable. La règle des jugements est la conscience des jurés éclairés par l'amour de la patrie, leur but le triomphe de la république et la ruine de ses ennemis, la procédure les moyens simples que le bon sens indique pour parvenir à la connaissance de la vérité dans les formes que la loi détermine.

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Elle se borne aux points suivants:

9. Tout citoyen a le droit de saisir et de traduire devant les magistrats les conspirateurs et les contre-révolutionnaires; il est tenu de les dénoncer dès qu'il les connaît.

10. Nul ne pourra traduire personne au tribunal révolutionnaire, si ce n'est la convention nationale, le comité de salut public, le comité de sûreté générale, les repré sentants du peuple commissaires de la convention et l'ac cusateur public du tribunal révolutionnaire.

11. Les autorités constituées en général ne pourront exercer ce droit sans en avoir prévenu le comité de salut

public et le comité de sûreté générale, et obtenu leur autorisation.

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12. L'accusé sera interrogé à l'audience et en public. La formalité de l'interrogatoire secret qui précède est supprimée comme superflue; elle ne pourra avoir lieu que dans les circonstances particulières où elle serait jugée utile à la connaissance de la vérité.

13. S'il existe des preuves soit matérielles, soit morales, indépendamment de la preuve testimoniale, il ne sera point entendu de témoins, à moins que cette formalité ne paraisse nécessaire soit pour découvrir des complices, soit pour d'autres considérations majeures d'intérêt public.

14. Dans le cas où il y aurait lieu à cette preuve, l'accusateur public fera appeler les témoins qui peuvent éclairer la justice, sans distinction de témoins à charge ou à décharge.

15. Toutes les dépositions seront faites en public, et aucune déposition écrite ne sera reçue, à moins que les témoins ne soient dans l'impossibilité de se transporter au tribunal; et dans ce cas il sera nécessaire d'une autorisation expresse des comités de salut public et de sûreté générale.

16. La loi donne pour défenseurs aux patriotes calomniés des jurés patriotes; elle n'en accorde point aux conspirateurs.

17. Les débats finis, les jurés formeront leur déclaration, et les juges prononceront la peine de la manière déterminée par la loi.

Le président posera la question avec clarté, précision et simplicité. Si elle était présentée d'une manière équivoque ou inexacte, le juré pourrait demander qu'elle fût posée d'une autre manière.

18. L'accusateur public ne pourra de sa propre autorité renvoyer un préveuu adressé au tribunal, ou qu'il y aurait fait traduire lui-même. Dans le cas où il n'y aurait pas matière à une accusation devant le tribunal, il en fera un rapport écrit et motivé à la chambre du conseil, qui pro

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noncera; mais aucun prévenu ne pourra être mis hors de jugement avant que la décision de la chambre n'ait été communiquée aux comités de salut public et de sûreté générale, qui l'examineront.

19. Il sera fait un registre double des personnes traduites au tribunal révolutionnaire, l'un pour l'accusateur public, et l'autre au tribunal, sur lesquels seront inscrits tous les prévenus à mesure qu'ils seront traduits.

20. La convention déroge à toutes celles des dispositions des lois précédentes qui ne concorderaient point avec le présent décret, et n'entend pas que les lois concernant l'organisation des tribunaux ordinaires s'appliquent aux crimes de contre-révolution et à l'action du tribunal révolutionnaire.

21. Le rapport du comité sera joint au présent décret comme instruction.

22. L'insertion du décret au Bulletin vaudra promulgation.

Couthon annonce qu'il est chargé par le comité de salut public, dont les pouvoirs sont expirés, de demander son renouvellement. L'assemblée le maintient dans ses fonc

tions.

SÉANCE DU VINGT-TROIS JUIN.

Suite.

Bourdon (de l'Oise). « Malgré l'aigreur qui s'est mêlée dans la discussion qui a eu lieu hier sur un décret salutaire, relatif au tribunal révolutionnaire, il n'en faut pas moins revenir aux principes. Je ne crois pas que la convention nationale, en restreignant à la convention, aux comités de salut public et de sûreté générale, et à l'accusateur public, le droit de traduire un citoyen au tribunal révolutionnaire, et en dérogeant aux lois précédentes qui ́ne concorderaient pas avec le présent décret; la convention, dis-je, n'a pas entendu que le pouvoir des comités

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s'étendrait sur les membres de la convention sans un décret préalable. (Non! non! s'écrie-t-on de toutes parts.) Je m'attendais à ces heureux murmures; ils annoncent que la liberté est impérissable. Décrétons que les comités feront, comme par le passé, des arrestations provisoires, mais que les représentants du peuple arrêtés ne pourront être traduits au tribunal révolutionnaire qu'après que la convention aura porté contre eux le décret d'accusation. »

Delbrel. « Le rapport que vient de faire Dubarran, au nom du comité de sûreté genérale, prouve assez qu'elles étaient les intentions des comités: il n'était question que de savoir si un suppléant serait admis parmi les représentants du peuple; cependant les comités n'ont pas cru pouvoir le rejeter sans l'assentiment de la convention. Bourdon n'avait donc pas le droit de se défier des intentions des comités. »

Bourdon (de l'Oise). « Il est étonnant qu'après avoir entendu cet heureux murmure par lequel on a rendu hommage aux principes, on dise que j'ai injurié les comités ! Le but de ma proposition était que les comités continuassent de faire des arrestations provisoires, qui ont été si utiles à la république, et qui le seront encore, mais que la convention exprimât formellement dans un décret qu'elle seule a le droit d'envoyer un de ses membres au tribunal révolutionnaire. Nos lois ne peuvent pas être trop bien rédigées, quand de leur rédaction dépend la liberté publi、 que. J'insiste pour que ma proposition soit mise aux

voix. »

Bernard (de Saintes.) «De la sûreté et de la tranquillité de la convention nationale dépendent essentiellement lat sûreté et la tranquillité publiques. Si l'on eût donné seule-ment aux comités le droit de traduire au tribunal révolutionnaire, il n'y aurait peut-être pas eu de réclamation; mais lisez le décret, et vous verrez que ce droit est accordé aux députés en mission et à l'accusateur public. Or qui de nous peut concevoir qu'un représentant du peuple

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