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répondirent que cela leur était égal, qu'ils s'en moquaient. Nous les arrêtâmes, et ils furent conduits au corps de garde: l'un se dit marchand de vin, et l'autre... »

Robespierre. « Le fait est faux; mais un fait vrai c'est

que

Tallien est un de ceux qui parlent sans cesse avec effroi et publiquement de la guillotine, comme d'une chose qui les regarde, pour avilir et pour troubler la convention nationale. »>

Tallien. « Il ne fut pas du tout question des vingt mille espions. »

Robespierre. Trois cents témoins l'ont entendu. Citoyens, vous pouvez juger de quoi sont capables ceux qui appuient le crime par le mensonge; il est facile de pronon. cer entre les assassins et les victimes. »>

Billaud-Varennes. « L'impudence de Tallien est extrême; il ment à l'assemblée avec une audace incroyable! Le fait dont il est question s'est passé avant-hier, puisque je le savais hier à midi. Les hommes dont a parlé Tallien sont d'excellents jacobins ; l'un se nomme Jarri. Mais, citoyens, nous nous tiendrons unis ; les conspirateurs périront, et la patrie sera sauvée ! » Applaudissements. ) Fallien, d'un air troublé : «Je croyais avoir dit que c'était avant hier.......... » ( Murmures. )

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On demande une seconde lecture du considérant adopté la veille sur la rédaction de Merlin.

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Barrère. Celte séance ne sera pas infructueuse pour la chose publique. Ne pas supprimer le considérant serait une chose dangereuse pour le gouvernement révolutionnaire; car que dit le considérant ? Que le droit qu'a la représentation nationale de décréter ses membres d'accusation est un droit inalienable. Or, décréter une pareille disposition le lendemain qu'une loi sur le tribunal révolutionnaire était portée, et la décréter sur une motion inquiète, qui tendait à produire des craintes sur la sûreté des représentants du peuple, n'est-ce pas évidemment vouloir faire soupçonner aux esprits crédules et faire dire par les malveillants que le comité de salut public a eu l'intention

de violer les lois qui constituent la représentation nationale ? Mais il suffit que Merlin ait déclaré avoir écrit le considérant, pour qu'aucune intention malveillante ne puisse lui être attribuée. Il n'en est pas de même de quelques uns des auteurs de ces plaintes sourdes et de ces manœuvres contre le comité. Cependant la convention ne peut pas entendre une seconde lecture; je demande que l'on passe de suite à l'ordre du jour sur les diverses motions, et que le considérant soit rapporté.

» Je vais citer deux faits qui prouveront à l'assemblée que les manœuvres qu'emploient ici les conspirateurs pour anéantir la république coïncident parfaitement avec ce qui se passe en Angleterre.

» Tous les députés ne lisent pas les papiers anglais; eh bien! apprenez que, pour nationaliser la guerre que les puissances nous font, on dit sans cesse que nous sommes sans gouvernement, que nous ne nous entendons pas nous-mêmes, que nous défaisons le lendemain ce que nous avons fait la veille, et que nous nous déchirons tour à tour. Vous lirez dans les papiers anglais les réponses de Pittà Georges et au parlement; vous y verrez qu'il leur répète tous les jours: « Quelle force peut avoir un gou» vernement qui n'obtient pas de respect, et qui ne jouit » d'aucune confiance?» C'est ainsi que nous attaquent nos ennemis. Ils sont donc leurs complices ou leurs auxiliaires ceux qui le savent et qui secondent, autant qu'il est en eux, cette sorte d'attaque par lés méfiances dont ils nous entourent! Certes ceux-là ne sont pas jaloux du gouvernement, qui cherchent par des insinuations perfides à empêcher le gouvernement de se rallier autour de la convention et la convention autour du gouvernement, dont il est le bras.

>> On est jaloux de la gloire de son pays lorsqu'on cherche à donner de l'énergie et de la force au gouvernement national.

>> On est jaloux des succès de la révolution républicaine lorsqu'on aide le gouvernement à vaincre ses ennemis intérieurs au lieu de lui en créer de nouveaux.

>> On est jaloux de l'honneur de la convention nationale lorsqu'on entoure ses opérations et ses comités de confiance et d'exécution, au lieu de les décrier et de les entraver

sans cesse.

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Citoyens, nous ne pouvons vaincre l'Europe royalisée que par l'ensemble de nos vœux et de nos délibérations, car les moyens de la république sont abondants et vigoureux : aussi le génie malfaisant des Anglais souffle sans cesse la division parmi nous. Tantôt ils ont voulu diviser les deux comités de sûreté générale et de salut public, tantôt diviser les membres de ces comités entre eux, ensuite diviser les comités et la convention, et enfin diviser la convention et le peuple.

» Jusqu'à présent les efforts liberticides des factions de l'étranger n'ont pu féconder les germes de division qu'ils ont apportés dans notre sein. Comment donc auraient-ils conçu de nouvelles espérances, maintenant que les armées ont des succès, que l'intérieur est plus tranquille, et que les chefs des factions ont subi la peine due à leurs crimes? Non, citoyens, leurs espérances horribles n'auront plus lieu, puisque les représentants ne peuvent plus douter que toutes les fois qu'ils attaquent, qu'ils tourmentent et qu'ils exaspèrent le gouvernement révolutionnaire, ils servent l'Angleterre, qui lui a juré la haine la plus implacable, avec tous les crimes et les assassinats qui sont à sa solde. » Voici l'autre fait, qui prouve que tout est dirigé dans l'intérieur de la république comme dans les états britanniques contre le gouvernement révolutionnaire. Ce sont les membres de ce gouvernement, qu'on ne cesse de calomnier et d'assassiner à la fois au physique et au moral. Dans les fêtes des Anglais, au milieu de leurs jeux, dans leurs répas même, il n'est question que d'assassiner leś membres des deux comités; l'assassinat est une spéculation commerciale pour eux; l'assassinat est honoré dans leurs jeux publics : c'est dans ces infâmes orgies, c'est dans leurs bals qu'ils accordent surtout à Robespierre une horrible priorité.

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» Je tiens à la main un papier anglais qui nous a été envoyé de Brest par Pricur (de la Marne); et qui a été trouvé dans un bâtiment dont nous nous étions emparés; Vous y verrez la trace de ce qui se passe à Londres. C'est sur Jean-Bon Saint-André, chargé de diriger les forces navales contre cette Carthage moderne, que Pitt dirige ses poignards et ses calomnies, parceque c'est lui qui est à la tête de notre marine; c'est Robespierre qu'il attaque, parcequ'il déjoue les ennemis de l'intérieur, et qu'il atterre les íactions anglaises.

» Les lettres particulières apprennent aussi que dans un bal masqué donné dernièrement à Londres, on a vu une femme, armée d'un poignard sanglant, et représentant une Charlotte Corday, poursuivre un Robespierre fictif, et le menacer de le maratiser.

» Le journal The Star (l'Étoile), du vendredi, 2 mai, donne des détails plus noirs.

• Bal masqué du Ranelag. Jamais on n'y a vu plus » de monde que le mercredi au soir. Il y eut société com» posée de masques, de dominos, et de visitants non déguisés ; il y avait plus de quinze cents personnes, et ce » nombre n'a guère diminué jusqu'au point du jour.

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>>Les masques de caractère n'étaient qu'en petit nombre > relativement au nombre total; peu méritaient attention: » les plus remarquables étaient 1° une Charlotte Corday » sortie du tombeau, agitant pendant toute la nuit son poi»gnard ensanglanté à la poursuite de Robespierre, qu'elle » jurait de maratiser en temps et lieu. (Mouvement d'hor»reur dans toute l'assemblée.) 2° Un somnambule rôdait » et balbuliait qu'il sommeillerait jusqu'au moment qu'il » fût temps que tout l'univers s'éveillat et parlât bon » sens... Sans doute à la manière des forbans, des banquiers et des ministres anglais !

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» Citoyens, voilà donc les fêtes de ce peuple cannibale! Voilà les jeux publics de ces rois marchands! Des assassins sont les acteurs de leurs bals, et le meurtre est le drame qui leur convient !

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Voilà donc aussi le sort des membres du gouvernement révolutionnaire! Accablés de travaux énormes, nous sommes placés entre tous les tyrans et leurs crimes, entre tous les aristocrates et leurs trahisons, entre les factions et leurs poignards, entre tous les mécontents et leurs in!rigues, et leurs fausses nouvelles, et leurs insinuations perfides! C'est à nous d'avertir les membres de la convention nationale des dangers qu'on sème sous leurs pas, des calomnies dont on nourrit la crédulité, et des intentions funestes qu'on prête aux meilleurs patriotes.

>> Je crois en avoir assez dit pour rappeler au peuple français ce qu'il peut espérer de ces anthropophages anglais, et ce qu'il doit craindre des ennemis de l'intérieur, qui fomentent la division et la calomnie contre ses représentants et contre le gouvernement révolutionnaire, qui peut seul le sauver. ⠀

>>

» Je demande que le considérant du décret rendu hier soit rapporté, et que l'assemblée passe à l'ordre du jour sur toutes les motions qui ont été faites à raison du décret sur le tribunal révolutionnaire.» (Applaudissements. De toutes parts: Aux voix! aux voix! Adoptė. )

La proposition de Barrère est rédigée en ces termes, et décrétée à l'unanimité :

« La convention nationale rapporte le considérant inséré dans le décret rendu hier sur une proposition relative à celui de la veille concernant le tribunal révolutionnaire, et passe à l'ordre du jour sur toutes les autres propositions qui ont été faites dans la discussion qui a eu lieu sur le même objet.

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SÉANCE DU VINGT-SIX JUILLET 1794 (8 thermid. an II).

Robespierre accuse les comités.

Robespierre, contrarié par ses collègues, avait cessé de paraître aux comités. Réfugié aux Jacobins, il les harangue, les échauffe, s'assnre de la commune, et quand il eut

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