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sulter le Moniteur. Nous avons dit : La convention natio nale a attiré le gouvernement à elle; la convention est vrai, ment le gouvernement, et les comités ne sont que des commissions établies près d'elle pour méditer et délibérer les mesures qui ne peuvent être méditées et délibérées pu bliquement.

» J'ai cru devoir faire ces observations; j'ai cru devoir rappeler les principes, pour prouver que tout ce que nous avons dit dans la convention ne doit pas nous être imputé à crime, parceque nous n'avons fait qu'user d'un droit fondé sur la liberté des opinions des représentants du peuple, pour combattre cette distinction misérable et dange→ reuse avec laquelle on voudrait établir une différence entre les représentants du peuple nommés dans les comités de gouvernement, et ceux qui n'en font pas partie; distinction qui donnerait lieu à des procès sans cesse renaissants contre ceux qui se succèderaient dans ces comités. Voilà les observations que j'ai cru devoir faire. Je vais me rendre au décret d'arrestation prononcé par l'assemblée. »

On lit la rédaction du projet d'arrestation.

*N.... « Je demande que les prévenus soient mis en arrestation chez eux, sous la garde des gendarmes. »

La rédaction est adoptée avec cet amendement.

« Collot-d'Herbois. Les réflexions qui viennent d'être faites par Barrère ont été nécessitées par une circonstance à laquelle nous ne nous étions pas attendus. Certes, si dans le rapport qui vient de vous être fait, on vous a donné une idée des réponses que nous avons opposées à quelques faits du rapport, il eût été inutile de prolonger la séance par des réflexions. La nécessité de ne pas laisser subsister cette masse de préventions a engagé l'un de nous à prendre la parole; mais je pense qu'il n'a pas tout dit. Il a été cependant au but; il a attaqué ces préventions dont nous charge l'opinion publique, il est entré dans le sanctuaire de vos consciences; il a interrogé votre justice. Citoyens, c'est aux principes, aux principes seuls que nous devons nous rattacher; il faut les appliquer aux

divers mouvements de la révolution; ce sont eux qui sont nos défenseurs et nos juges. Pour vous, vous devez rapprocher les faits des circonstances qui y ont donné lieu; vous devez examiner que ceux qui ont été chargés de diriger le vaisseau pendant la tempête n'ont pu s'appuyer que de votre puissance; car, comme l'a dit Barrère, vous étiez l'âme et la pensée du gouvernement. Son action seule était dans les comités : elle était inséparable de vous et du peuple lui-même. La providence du gouvernement a été dans les dangers de la patrie, dangers qui ont dicté les mesures qui ont été prises, et contre lesquelles on ne peut s'élever aujourd'hui, parcequ'elles ont été commandées par les périls publics, et qu'elles disparaissent avec eux.

>> Le premier principe que nous réclamons avec sécurité est celui-ci : Tout acte arbitraire, toute mesure extraordinaire, inutile pour sauver la patrie, est condamnable; mais que tout ce qui fut nécessaire soit légitime, sans cela, le passé n'est rien, le présent n'est rien, l'avenir ne sera rien encore; sans cela la révolution n'inspire plus de confiance; ce qui était bien l'année dernière sera un crime aujourd'hui, ce qui est bien aujourd'hui sera condamné dans l'année à venir.

» Il est encore un grand principe, un principe salutaire des gouvernements représentatifs, auquel nous applaudissons, malgré la douloureuse expérience que nous en faisons: c'est que ceux qui ont été revêtus d'un pouvoir étendu doivent tomber nécessairement dans la défaveur. Il est de la nature des gouvernements populaires d'être jaloux, et la disgrâce suit ordinairement de près la puissance. On ne doit ni s'en étonner, ni s'en plaindre; mais il faut créer, pour celui qui a gouverné, une sauvegarde qui le garantisse du ressentiment des ennemis de la république; autrement, comment le gouvernement démocratique pourra-t-il exister?

» On réclame un grand exemple. Eh bien ! examinez notre conduite; si nous sommes coupables, ne nous faites pas de grâce. On nous a privés de nos droits; nous avons

souffert sans nous plaindre. Mais, citoyens, au nom de la démocratie, examinez ce que nous avons fait. Rappelez-. vous qu'un grand nombre des citoyens des républiques anciennes sont morts victimes des factions qui se sont succédé tour à tour; pensez que si ces accusations que dénonce l'histoire n'eussent pas été si précipitées, leurs contemporains n'auraient pas eu le regret d'avoir sacrifié des hommes qui les avaient bien servis.

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» Si nous n'avions pas fixé la victoire sous les drapeaux de la république, si nous n'avions pas comprimé les ennemis du peuple, ou que nous eussions partagé leurs complots, nous pourrions craindre la foule d'ennemis qui nous poursuivent aujourd'hui, dont on nous a cité des paroles auxquelles nous répondrons par des faits. Mais on porte contre nous une accusation absolument contraire. Eh bien! si les pouvoirs que vous nous avez confiés étaient au-dessus de nos forces, si nous avons été égarés par leur étendue, qu'on nous punisse pour servir d'exemple à ceux qui nous succèderont. Mais nous nous consolerons des peines qui nous seront infligées, en pensant que nous n'aurons d'autre reproche à nous faire que celui de l'erreur. Je vais me soumettre au décret d'arrestation. »

SÉANCE DU VINGT-TROIS MARS 1795 (3 germ. an III). Procès de Billaud-Varennes, Collot-d'Herbois et Barrère. Carnot, Prieur, etc., prennent la défense de leurs collègues. La décision est ajournée,

Carnot. Citoyens, je vais parler pour les prévenus. Ils sont dans le malheur à ce titre, fussent-ils coupables, l'humanité vous engage à m'entendre favorablement.

>>

:

Je pourrais me tenir à l'écart en ces circonstances, puisque je fus constamment opposé aux mesures violentes ; puisque depuis long-temps j'avais attaqué personnellement Robespierre et Saint-Just, dans le sein du comité de salut public; puisque je n'avais cessé de m'élever contre Hanriot et la municipalité conspiratrice.

» J'ai combattu souvent les prévenus eux-mêmes lorsque tout faiblissait devant eux ; je les défendrai, maintenant que chacun les accable.

» On a violé à leur égard la déclaration des droits, qui veut que tout citoyen soit déclaré innocent; jusqu'à ce qu'il ait été légalement déclaré coupable; on a provoqué contre eux le meurtre et les fureurs de la vengeance; je me borne à invoquer aujourd'hui la discussion froide et impartiale de leur conduite et de leurs intentions.

» La calomnie déchire d'avance tous ceux qui voudraient dire quelque chose à leur décharge; la proscription les menace; mais je n'écouterai que la justice, et je fermerai les yeux sur les dangers.

» Déjà ici j'ai voulu empêcher que la hache pénétrât de nouveau dans le sein de la convention nationale; de sanguinaires libellistes m'ont sur-le-champ mis au nombre des complices de Robespierre.

» Mais je ne crains pas les qualifications odieuses qui me furent et me seront sans doute encore prodiguées; mon caractère connu, mes habitudes privées, tous les discours que j'ai tenus à cette tribune en divers temps, les rendent, ces qualifications, trop absurdes et trop invraisemblables.

J'ai rempli des missions nombreuses et délicates; je n'y ai été sévère qu'envers moi-même. Mes actions sont celles d'un homme probe; ma correspondance celle d'un homme sensible et moral,

» J'ai servi de mon mieux la démocratie; je me suis passionné pour la cause populaire; mais partout où mes devoirs m'ont appelé, j'ai maintenu la dignité du caractère dont j'étais revêtu.

D. Je n'étais à Paris ni aux époques des 2 et 3 septembre, ni à celle du 31 mai. J'ai vécu isolé ; je n'ai jamais manqué l'occasion de me prononcer contre les factions quelconques, contre toute espèce de tyrannie, contre la permanence des pouvoirs. Je puis donc parler librement des prévenus, ma conscience à moi ne me reproche rien.

» La malveillance se plaît en vain à citer quelques signa

tures données par moi à des actes répréhensibles. Il faut expliquer une fois pour toutes à la convention nationale, ce que c'est que ces signatures de l'ancien comité de salut public. Cette explication est nécessaire, non seulement pour prévenir les inculpations qu'on pourrait diriger contre les membres de ce comité qui ne sont pas au nombre des prévenus, mais encore parcequ'elle atténue les charges contre ceux qui le sont, en précisant les limites de la responsabilité personnelle de chacun d'eux.

» Les signatures données par les membres de l'ancien comité de salut public (je parle des signatures en second) étaient une formalité prescrite par la loi, mais absolument insignifiante par rapport à celui qui était tenu de la remplir: ce n'était de sa part ni une adhésion expresse, ni même un acquiescement donné de confiance. Ces signatures enfin n'étaient pas seulement des certifiés conformes, car cela. supposerait que le signataire aurait lu et collationné, ce qui n'est pas vrai. Elles ne sont précisément, et n'ont jamais été que de simples vus, une opération purement mécanique, qui ne prouve rien, qui n'atteste rien, sinon que le rapporteur, c'est-à-dire le premier signataire de la minute, s'est acquitté de la formalité prescrite de soumettre la pièce en question à l'examen du comité.

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Ces visa néanmoins, quoique insignifiants par rapport à celui qui les donne, ne sont pas pour cela inutiles en euxmêmes; car ils astreignent le rapporteur à faire passer son travail sous les yeux de ses collègues, ce qui l'expose à une censure, qui se fait très rarement, à la vérité, mais qui cependant a lieu quelquefois.

» Voilà comment il est arrivé qu'on a présenté, dans l'accusation intentée contre Lecointre, et dans le rapport de la commission des vingt-un, différentes pièces signées de moi, dont je n'avais jamais eu connaissance, et même rédigées contre mon gré; par exemple, une instruction relative à la commission populaire d'Orange, lorsqu'il est de fait que j'ai ignoré très long-temps l'existence de cette commission; une lettre à Joseph Lebon, pour étendre ses

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