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d'état ou de profession ils ont sacrifié sous le despotisme: si. la révolution les a éclairés, si elle les a ramenés aux principes de l'égalité, s'ils marchent constamment avec vous, s'ils vous accompagnent fidélement dans votre course révolutionnaire, n'envisagez en eux que des frères et des amis.

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Lorsque vous vous êtes élevés aux principes sublimes de l'égalité, vous ne devez pas en redescendre pour retracer la ligne de démarcation que des préjugés de famille ou de profession avaient rendue si sensible, et que la révolution a dû effacer.

» Vous ne devez pas vous reporter au berceau de vos concitoyens, ni vous rappeler le souvenir de la profession qu'ils exercèrent pour fixer votre jugement: examinez et pesez leur conduite; ils se sont prononcés par leurs actions.

» Vous n'imiterez pas la conduite des tyrans: leur politique consiste à tout détruire; la vôtre est de conserver. Ce n'est pas pour vous seuls que vous avez fondé une République ; c'est pour tout Français qui veut être libre. Il ne vous est permis d'en exclure que le mauvais citoyen; mais le Français qui, après avoir sacrifié à l'ignorance et aux préjugés, a ouvert les yeux à la lumière, a expié ses égaremens, a réparé ses fautes ou s'est montré votre émule dans la carrière, peut ici comme vous réclamer les droits de la nature et les principes de l'égalité.

» Vous êtes trop éclairés sur votre situation pour ne pas savoir combien de citoyens se sont égarés dans les routes de la révolution. Ils sont venus enfin se rallier à la représentation nationale; voudriez-vous les rejeter de votre sein? Quels frères, quels amis fidèles vous perdriez ! N'est-ce pas le même sang qui circule dans les veines de cette généreuse et vaillante jeunesse qui attend de vous la liberté de ses parens comme le plus digne prix de ses travaux et de ses victoires?

» Ces jeunes guerriers qui meurent dans les combats se flattent de transmettre à leurs pères et mères la liberté qu'ils ont si bien défendue; c'est leur dernier vœu : c'est à vous, représentans du peuple, à le remplir.

C'est de la France active et laborieuse qu'il faut vous entretenir.

>> Les sciences et les arts ont été persécutés; les savans et les

artistes ont été opprimés: on voulait rendre la France barbare pour l'asservir plus sûrement. Cependant les arts et les sciences ont fait nos succès; c'est par eux que le Français instruit recueille sous ses pieds les élémens dont il compose la foudre qui écrase les tyrans.

» C'est par eux que l'art de Montgolfier perfectionné transporte dans les airs vos généraux, vos ingénieurs, leur découvre les manœuvres de Cobourg, et décide le succès de la bataille de Fleurus.

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» C'est par eux que les métaux se préparent et s'épurent, que de nouvelles richesses, de nouveaux moyens de de guerre, nouvelles sources de prospérité pour la paix sortent du sein de la terre.

» C'est par eux que les cuirs se tannent, s'apprêtent et se mettent en œuvre dans huit jours.

» C'est aux arts et aux sciences dans l'oppression que nous devons ces étonnantes et utiles merveilles. S'ils ont fait ces rapides progrès malgré les fureurs de Robespierre, qui n'osa jamais envisager un savant ni un homme utile, que ne ferontils pas lorsqu'ils partageront les avantages de la liberté et de l'égalité! Ils ont proclamé les premiers les droits de l'homme; faut-il qu'ils ne puissent pas les invoquer ? Vous ne serez véritablement heureux, vous ne jouirez de tout le bonheur auquel vous avez le droit d'aspirer que lorsque vous aurez rétabli la confiance publique, employé tous les talens, toutes les lumières ; que le savant et l'artisan se traiteront en frères et en amis, et jouiront des mêmes droits et de la même liberté.

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L'agriculture a fait des progrès et d'incroyables efforts mais elle réclame aujourd'hui des secours pressans : encouragez le propriétaire et le cultivateur. De combien de maux l'agriculture n'a-t-elle pas été affligée! combien d'hommes utiles les émissaires de Robespierre ne lui ont-ils pas enlevés ! Nous avons craint longtemps que les terres ne fussent pas cultivées, que les herbages ne fussent pas couverts de bestiaux, tandis l'on retenait dans les maisons d'arrêt les propriétaires ou les fermiers des terres et des herbages. Vous avez servi utilement l'agriculture en rendant à leurs travaux les membres des comités de surveillance des communes des campagnes ; il faut

que

maintenant y rappeler l'amour du travail, exciter l'ardeur de vos concitoyens. On se plaint de manquer de bras, mais on se dissimule qu'un grand nombre de citoyens, distraits, occupés ailleurs, ont moins d'activité et sont moins assidus que les circonstances ne l'exigent. Rappelez la sécurité ; éteignez les flambeaux de la haine et de la discorde; faisons oublier à nos concitoyens les malheurs inséparables d'une grande révolution; disons-leur que le passé n'est plus à nous, qu'il appartient à la postérité; disons-leur qu'ils ont combattu, qu'ils ont souffert pour la liberté, pour l'égalité; prouvons-leur enfin et qu'ils sentent qu'ils sont libres, qu'ils sont égaux.

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Que vos lois, que vos institutions appellent l'homme au travail; que tout homme utilé et laborieux soit assuré de sa liberté et de son indépendance; que le travail soit honoré; que l'oisiveté soit flétrie.

» Tous les arts, toutes les professions appellent votre attention et vous demandent des encouragemens : leurs productions ont surpassé ce que l'on pouvait en attendre; mais si l'on a prouvé ce que l'on pouvait faire, on ne s'est pas assez longtemps soutenu. Les travaux languissent, les besoins augmentent, la consommation est excessive; cependant un grand nombre de cultivateurs ne font pas battre leurs grains, ne font pas rouir leurs lins, ne font pas teiller leurs chanvres : ils conservent leurs laines; la filature est négligée. Rappelez l'activité dans les campagnes, dans les ateliers, dans les fabriques et dans les manufactures.

» Le commerce de France offre aujourd'hui des ruines et des débris on avait aussi conspiré contre le commerce; Robespierre voulait l'anéantir. Un génie destructeur planait sur la France, et frappait en même temps l'agriculture et le commerce; il faisait détruire les fabriques de soie, et forçait d'abandonner la culture du mûrier, l'une des principales ressources des départemens méridionaux; il faisait transporter les huiles en pays étranger pour détruire vos savonneries.

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Que pouvons-nous attendre, que pouvons-nous espérer de ces bouleversemens? Les nations étrangères vous envoient leurs productions; elles vous demandent les vôtres en retour; mais vous les consommez. Offrirez-vous des métaux? Quelles

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mines assez fécondes pourraient suffire à vos besoins? Vos ressources seront bientôt épuisées. C'est à l'industrie nationale à vous acquitter envers l'étranger; c'est aux chefs des fabriques et des manufactures à conduire, à diriger leurs travaux, à faire exécuter les ouvrages et les desseins qui conviennent aux peuples et aux nations qui commercent avec vous; c'est aux négocians à rassembler, à distribuer et disperser les productions du sol et de l'industrie dans les diverses parties du monde, et à en tirer et faire arriver dans vos ports les productions qui vous sont nécessaires.

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Préservez la France du malheur d'être tributaire des autres nations en payant leurs productions en métaux; elle ne le serait pas même longtemps. Rendez au commerce ce que l'erreur et l'ignorance lui ont enlevé.

» Que faut-il aux Français pour réparer tant de désastres? Un regard de leurs concitoyens et la liberté. Apprenez aux Français à distinguer leurs amis de leurs ennemis : tous les citoyens se sont prononcés; on peut les connaître tous; ce n'est plus le soupçon qui doit nous guider; le mauvais citoyen est connu par ses actions, le bon citoyen est connu par ses sacrifices, par des épreuves multipliées, par ses services, par sa vie active et laborieuse.

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» Prononcez solennellement que tout citoyen qui emploie ses jours utilement aux travaux de l'agriculture, aux sciences, aux arts, au commerce, qui élève ou soutient des fabriques, des manufactures, ne peut être inquiété ni traité comme suspect.

» Rendez aux manufactures toutes les matières qui sont sous les scellés; faites remettre en circulation toutes les marchandises que l'on avait expédiées pour diverses destinations, et que l'on conserve dans des dépôts en attendant une interprétation nécessaire du décret qui ordonne la confiscation de toutes les marchandises expédiées pour des communes en état de rébellion.

» Portez vos regards sur Commune- Affranchie; faites cesser la démolition des édifices et des maisons; faites rentrer les citoyens dans leurs ateliers; ils sont faits pour créer, et non pas pour détruire. Ce ne sont pas des règlemens que l'on vous demande: assurez la liberté de l'exportation; il se présentera

un assez grand nombre de citoyens pour rassembler la soie, la faire fabriquer, et faire expédier les étoffes en pays étranger. Les autres manufactures, la chapellerie, la fabrique de draps se releveront avec le même succès, et Lyon sortira de ses ruines.

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Que Marseille se res souvienne des moyens qui firent sa gloire et sa prospérité : des passions exaltées lui ont fait oublier les avantages de sa situation, ses intérêts et ses besoins ; cette commune, dont le commerce était si brillant et si utile, qui s'enorgueillissait de se suffire à elle-même et d'alimenter le midi, ne subsiste plus que par les secours que le gouvernement lui envoie ; à peine peut-on y rassembler quelques négocians pour former deux agences qui recueillent les débris du commerce du Levant et des Barbaresques.

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» A Cette on a regardé comme des contre-révolutionnaires des négocians qui faisaient le sacrifice de leur fortune pour exécuter un arrêté du comité de salut public qui les chargeait de faire des exportations pour acquitter la République d'une partie de ses engagemens.

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Tel est le résultat de tant de déclamations contre le commerce: on l'a anéanti lorsqu'il fallait réprimer ses écarts, le diriger vers l'utilité publique, punir des coupables, et encourager ceux qui voulaient et pouvaient servir la patrie: tel sera toujours l'effet des proscriptions générales.

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Eteignez le feu des passions qui brûle le midi : que les habitans de cette contrée sachent que vous estimez leurs talens, leurs connaissances, que vous les avez mis en réquisition pour concourir au salut de la patrie; qu'ils sachent que vous voulez réunir tous les Français, faire cesser les dissensions et les discordes civiles, et le commerce renaissant saura pourvoir à vos besoins.

» Bordeaux attend de vous des encouragemens ; il prépare des expéditions, mais de grands obstacles retardent encore les mouvemens de ce port.

» Tout retentit ici du bruit des malheurs qui ont affligé la commune de Nantes. Que pouvait le commerce au milieu de tant de calamités et de persécutions? Cette citadelle de l'ouest a soutenu un siége de plus de quinze mois; elle a combattu

XIV.

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