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dans ces contrées; ils sont pénétrés des grandes et importantes fonctions qu'ils vont remplir. Une discipline exacte, une conduite régulière, une activité soutenue, un ordre de marche continuel et suivi, sont les seuls moyens de détruire les rebelles, de contenir les hommes suspects, et de rassurer les bons citoyens.

» Des brigands, connus sous le nom de Chouans, ont infesté la rive droite de la Loire et les routes de la ci-devant Bretagne. Plusieurs courriers, plusieurs voyageurs ont été assassinés; quelques citoyens, chargés de faire exécuter des réquisitions, ont péri par la main de ces brigands.

» Les représentans du peuple envoyés dans ces départemens en sont instruits; leur surveillance, les mouvemens fréquens de troupes rendront les communications sûres, et préserveront ces départemens des malheurs qui ont assailli la Vendée.

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L'exemple de courage, de probité, d'union que vous donnerez ici doit aussi avoir la principale influence sur les départemens de l'Ouest. On oubliera le faste, le luxe et le crime de quelques généraux ; l'armée répondra à votre attente, et le peuple ne reconnaîtra dans les soldats de la liberté que des vengeurs. Le calme que vous établirez ici, les grands principes que vous consacrerez, et dont les représentans et les généraux sc montreront pénétrés, feront cesser ces troubles affreux qui désolent une si belle contrée, que vous devez reconquérir à la liberté. C'est par les lumières, par la force des principes, par la raison, par une armée terrible aux rebelles, protectrice des bons citoyens, que vous acheverez cette conquête.

> Vous ne voulez négliger aucuns moyens d'éclairer le peuple, de l'attacher à la révolution. Il en est un puissant que l'on a trop négligé dissipez les ténèbres de l'ignorance, répandez les lumières et l'instruction; mettez entre les mains de vos concitoyens ces ouvrages si désirés dans lesquels ils apprendront leurs droits et leurs devoirs. Pourquoi le temple des sciences et des arts est-il encore fermé ? Les moyens d'instruction ne doivent-ils pas être à portée de tout citoyen, comme les moyens de travail ? Dans le Valais tout habitant sait cultiver son champ, les arts et les sciences; toute maison renferme une

collection des meilleurs livres, des outils les plus ingénieux des différens arts et métiers, et des instrumens d'agriculture, dont le sait faire usage.

possesseur » Vous avez formé le camp des Sablons pour faire instruire sous vos yeux de jeunes citoyens dans l'art de la guerre ; pourquoi n'ordonneriez-vous pas qu'il serait ouvert à Paris un cours d'études pour former des instituteurs, et qu'un nombre déterminé de citoyens de tous les districts, capables de remplir de pareilles fonctions, se rendrait à Paris pour y suivre ce cours? Quelque plan d'instruction que vous propose le comité que' vous avez chargé de cet ouvrage, il est permis de prévoir que l'exécution en sera difficile si l'on ne s'occupe pas dès ce moment du soin de former des instituteurs.

» Vous avez cependant des mesures provisoires à adopter. Le peuple a besoin que vous l'entreteniez souvent : remplissez le vide de ses fêtes décadaires; ordonnez à votre comité d'instruction publique de rédiger dans le cours de chaque décade un cahier d'instruction; que ces cahiers soient un répertoire de vos travaux et des principaux événemens; que l'on y trouve des conseils, des règles de conduite; qu'ils respirent l'amour du travail, les inœurs et l'honnêteté publique; qu'une narration pure et facile attache et intéresse.

» Si un pareil ouvrage est bien exécuté, si vous en ordonnez la lecture dans le lieu des séances de l'assemblée générale de chaque commune le décadi, les citoyens s'y rendront en foule avec leurs femmes et leurs enfans. Quel que soit le plan que l'on adopte à l'avenir sur les fêtes décadaires, vous devez regarder comme un devoir indispensable de remplir vousmêmes ces fêtes, de les animer, d'y répandre de l'intérêt : vous ne pouvez le faire par la pompe d'un frivole spectacle; faites-le par l'instruction.

>> On vous parlait dernièrement de la liberté de la presse ; on vous demandait une garantie. Vous avez rappelé les dispositions de la Déclaration des Droits de l'homme, et les Français ont jaré de mieux conserver le dépôt qui leur est confié.

» Vos concitoyens vous demandent aujourd'hui une garantie de la liberté individuelle. Répondez-leur que, tous les citoyens étant égaux, la loi doit être égale pour tous.

Lorsque vous fûtes informés que des laboureurs se consu→ maient dans l'ennui et l'oisiveté des maisons d'arrêt, vous ordonnâtes avant la récolte qu'ils fussent mis en liberté. Vos comités vous annoncent qu'il y a encore dans ces maisons d'arrêt un grand nombre de citoyens appliqués aux arts, aux sciences, à l'agriculture, des chefs de manufactures des commerçans dont la détention est ruineuse pour eux et nuisible à la République : vos comités ont pensé qu'il ne convenait pas moins à la justice qu'à l'intérêt national de mettre en liberté ces citoyens, dont l'utilité ne peut être contestée, et dont les services sont nécessaires.

» La liberté est le plus grand des encouragemens que vous puissiez donner aux hommes utiles : vous ne devez plus souffrir que l'on vous prive de leurs lumières, de leurs veilles et de leurs travaux. La reconnaissance leur prescrira de se dévouer au service de la patrie. Votre comité de sûreté générale, formant un grand juri, saura remplir le vœu de la nation, et, en rejetant les réclamations des hommes inutiles ou dangereux, renvoyer dans le sein de leurs familles des citoyens qui ne feront usagé de leur liberté que pour concourir à la prospérité générale.

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» Des circonstances vous avaient obligés d'accorder aux municipalités un pouvoir illimité sur la délivrance ou le refus des certificats de civisme; ces dispositions furent alors nécessaires : maintenant il convient d'ajouter aux lois des dispositions qui en conserveront tous les avantages, et en feront disparaître les inconvéniens ; il ne convient plus aux circonstances actuelles de laisser aux municipalités la faculté de refuser des certificats de civisme sans en exprimer les causes. Les comités vous proposent de décréter que les municipalités exprimeront les motifs de leur refus lorsqu'elles croiront devoir refuser les certificats de civisme qui leur seront demandés. Ils ont pensé qu'il devait être permis de soumettre à la décision des directoires de district l'examen des motifs de refus. Ces dispositions ont paru nécessaires pour faire cesser des abus et de graves inconvéniens. On sait quelles sont les suites du refus d'un certificat de civisme; des fonctionnaires publics qui rejetent en quelque sorte du sein de la société ceux qui éprouvent leur refus ne doivent pas en laisser ignorer les motifs.

» Les besoins pressans et multipliés du commerce ont encore déterminé vos comités à vous soumettre plusieurs propositions dont ils demandent le renvoi à vos comités des finances et de commerce.

» Les mesures que vos comités vous proposent leur ont paru celles que les circonstances devaient faire adopter. Rendre la liberté à tous les hommes utiles, imprimer le sceau de l'humiliation sur l'oisiveté, rappeler les institutions à leur origine, les pouvoirs à leur centre, honorer le travail, encourager le commerce, répandre des lumières, établir de fréquentes communications entre le peuple et ses représentans, poser les bases de l'instruction publique, leur ont paru les seuls moyens qu'ils dussent vous proposer pour remplir vos vues, soutenir l'éclat de la nation française, et assurer sa gloire et sa prospérité.

A la suite de ce rapport, qui est couvert d'applaudissemens, Lindet fait adopter plusieurs décrets : 1° seront examinées sans délai les réclamations des pères et mères des défenseurs de la patrie, de tous les citoyens agriculteurs, artistes et commerçans mis en état d'arrestation; 2° les municipalités et comités de section qui refuseront des certificats de civisme seront tenus d'exprimer les motifs de leur refus; 3° dans le cours de chaque décade un cahier d'instruction civique et républicaine sera rédigé, publié, lu dans toutes les communes devant le peuple assemblé ; ;; 4° des Ecoles normales (1) seront instituées ; 5° des mesures seront prises pour la prospérité des finances, du commerce, de l'agriculture, etc.

La situation militaire de la République se lisait chaque jour dans l'annonce d'une nouvelle victoire; toutefois la Convention nationale, après avoir applaudi au résultat d'une campagne si mémorable dans nos fastes, voulut connaître la marche des principales opérations: Carnot, qui les avait dirigées en partie, lui présenta le rapport suivant.

(1) Voyez à ce sujet la note de la page 402 du tome XV.

Du

RAPPORT sur la situation militaire de la République, fait par Carnot au nom du comité de salut public. 1er vendémiaire an 3. (22 septembre 1794.)

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Citoyens, vous avez ordonné qu'il serait fait par votre comité de salut public un rapport sur les événemens qui ont précédé, accompagné et suivi la prise de Landrecies, du Quesnoy, de Valenciennes et de Condé. Les derniers renseignemens que nous attendions étant arrivés, nous nous empressons de satisfaire au devoir que vous nous avez prescrit. Je vais donc tracer devant vous, au nom du comité de salut public, l'époque la plus saillante d'une campagne qui ellemême offre la série d'événemens militaires la plus glorieuse pour la liberté dont il soit fait mention dans les annales des peuples.

» La reprise des quatre forteresses envahies sur la frontière du nord n'est point une victoire par elle-même; mais elle est le résultat de trente victoires qui l'avaient précédée : le sang que devait coûter ces forteresses était répandu d'avance, et le bonheur des combinaisons militaires a été d'empêcher qu'il n'en fût versé de nouveau ; ça été de préparer les choses de manière que ces redoutables boulevarts, qui pouvaient tant coûter encore, tombassent d'eux-mêmes, fussent enlevés comme une palme digne des guerriers intrépides qui avaient juré de ressaisir de leurs mains républicaines le sol de la liberté.

» Dès l'ouverture de la campagne le comité de salut public avait senti la nécessité de s'écarter dans le cours de cette guerre des routes usitées. Des places formidables à reprendre, appuyées d'un côté par la Sambre et la forêt de Mormalle, de l'autre par la Scarpe et les bois de Saint-Amand, soutenues par tout ce que l'ennemi avait pu concentrer sur ce point de forces animées par l'espoir de la contre-révolution et du pillage de la France; voilà les obstacles qu'il fallait vaincre avec des troupes presque toutes de nouvelle levée : ils étaient tels ces obstacles qu'en les attaquant de front deux ans d'une prospérité continue, une perte d'hommes incalculable,

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