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dans tous nos ouvrages ouvrages élémentaires. Notre supériorité se réduit donc à quelques progrès dans les études naturelles; progrès qui appartiennent à la marche du temps, et qui ne compensent pas, à beaucoup près, la perte de l'imagination qui en est la suite. La pensée est la même dans tous les siècles; mais elle est accompagnée plus particulièrement ou des arts ou des sciences : elle n'a toute sa grandeur poétique et toute sa beauté morale qu'avec les premiers.

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Mais, dira-t-on, si le siècle de Louis XIV a conçu toutes les idées libérales (1), pourquoi donc n'en a-t-il pas fait le même usage que nous ? Certes, ne nous vantons pas notre expérience! Les Pascal et les Bossuet ont vu plus loin que nous, puisqu'en connoissant comme nous, et mieux que nous, la nature des choses, ils ont senti le danger des innovations. Quand leurs ouvrages ne prouveroient pas qu'ils ont eu sur tous les sujets des idées philosophiques, pourroit-on croire que ces grands hommes n'ont pas été frappés des abus qui se glissent par-tout, et qu'ils ne connois soient pas le

(1) Barbarisme que la philosophie a emprunté des Anglois. Comment se fait-il que ce prodigieux amour de la patrie qui nous tourmente, aille toujours chercher ses mots dans un dictionnaire étranger?

foible et le fort des affaires humaines? Mais tel étoit leur principe, qu'il ne faut pas faire un petit mal, même pour un grand bien (1), à plus forte raison pour de vains. systêmes dont le résultat est presque toujours effroyable. Ce n'étoit pas par défaut de génie, sans doute, que ce même Pascal, qui (comme nous l'avons montré ) connoissoit si bien le vice des loix dans le sens absolu, disoit dans le sens relatif: « Que » l'on a bien fait de distinguer les hommes » par les qualités extérieures! Qui passera de » nous deux? qui cédera la place à l'autre? » le moins habile? Mais je suis aussi habile » que lui; il faudra se battre pour cela. Il » a quatre laquais, et je n'en ai qu'un; cela est » visible; il n'y a qu'à compter; c'est à » moi à céder, et je suis un sot si je le.

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Quelle profondeur de jugement sous ces formes ironiques cela répond à des volumes de sophismes. L'auteur des Pensées se soumettant aux quatre laquais, est bien autrement philosophe que tous ces penseurs les quatre laquai sont révoltés.

que

En un mot, pour le répéter, le siècle de Louis XIV est resté paisible, non parce qu'il n'a point apperçu telle ou telle chose; mais

(1) Hist. de Port-Royal.

parce qu'en la voyant, il l'a pénétrée jusqu'au fond; parce qu'il en a considéré toutes les faces et connu tous les périls. S'il ne s'est point plongé dans les idées du jour, c'est qu'il leur a été supérieur. Nous prenons sa puissance pour sa foiblesse; son secret et le nôtre est renfermé tout entier dans cette pensée de Pascal :

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<< Les sciences ont deux extrémités qui » se touchent; la première est la pure igno»rance naturelle, où se trouvent tous les hommes en naissant; l'autre extrémité » est celle où arrivent les grandes ames qui, ayant parcouru tout ce que les hom» mes peuvent savoir, trouvent qu'ils ne » savent rien, et se rencontrent dans cette » même ignorance d'où ils sont partis ; mais >> c'est une ignorance savante qui se connoît. >> Ceux d'entre deux qui sont sortis de l'igno»rance naturelle, et n'ont pu arriver à l'au» tre, ont quelque teinture de cette science suffisante, et font les entendus. Ceux-là » troublent le monde et jugent plus mal » que tous les autres. Le peuple et les » habiles composent pour l'ordinaire le train » du monde; les autres les méprisent et en » sont méprisés

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Nous ne pouvons nous empêcher de faire en ce moment un triste retour sur nousmêmes. Pascal avoit entrepris de donner au

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monde l'ouvrage, dont nous publions une si petite et si foible partie. Quel chefd'œuvre ne seroit point sorti des mains d'un tel maître ! Si Dieu ne lui a pas permis d'exécuter son dessein, c'est qu'apparemment il n'étoit pas bon que tous les doutes sur la foi fussent levés, afin qu'il restât matière à ces tentations et à ces épreuves, qui font les saints et les martyrs.

DU CHRISTIANISME,

O U

BEAUTÉS

DE

LA RELIGION CHRÉTIENNE.

TROISIÈME PARTIE.

BEAUX-ARTS ET LITTÉRATURE.

LIVRE I I I.

HISTOIRE.

+

CHAPITRE PREMIER.

Du Christianisme, dans la manière d'écrire l'histoire.

Si le christianisme a fait faire tant de progrès aux idées philosophiques, il doit être nécessairement favorable au génie de l'histoire, puisque celle-ci n'est qu'une

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