Lycoris, au petit front, brûle pour Cyrus; Cyrus est entraîné vers Pholoé, qui le repousse, et l'on verra les chèvres s'unir aux loups de l'Apulie, avant que Pholoé cède à un indigne amour. Ainsi l'ordonne Vénus, qui se plaît, dans ses jeux cruels, à enchaîner sous un joug d'airain les esprits les plus divers, les êtres les plus opposés. Moi-même, lorsqu'une femme plus digne de moi briguait mon amour, Myrtale l'affranchie me retint sous une chaîne que je chérissais; Myrtale, plus emportée que les flots de l'Adriatique bouillonnant dans les golfes de la Calabre. LÉON HALEVY. XXXIV. PALINODIE. Moi qui n'honorais les dieux que par de faibles et rares offrandes, égaré par les leçons d'une folle sagesse, je suis obligé maintenant de tourner ma voile, et de reprendre la route que j'avais abandonnée. Car j'ai vu Jupiter, qui, jusqu'à ce jour, ne lançait qu'à travers un ciel chargé de nuages sa foudre étincelante, pousser au milieu d'un ciel pur ses chevaux tonnans et son char rapide. A ce bruit, tout s'ébranle, et la terre insensible, et les fleuves errans, et le Styx, et l'horrible séjour du Ténare odieux, et les sommets de l'Atlas. Oui, Dieu peut élever ce qui est humble, abaisser ce qui est fort, faire briller ce qui est obscur. La Fortune, avec un bruyant éclat, dépouille violemment du dia MUTARE, et insignia attenuat Deus, XXXV. AD FORTUNAM ANTIATEM. O Diva, gratum quæ regis Antium, TE pauper ambit sollicita prece TE Dacus asper, te profugi Scythæ, INJURIOSO ne pede proruas Stantem columnam, neu populus frequens TE Concitet, imperiumque frangat. semper anteit sæva Necessitas, Clavos trabales, et cuneos manu Gestans ahena; nec severus Uncus abest, liquidumque plumbum. dème un front superbe, et court, joyeuse, le poser sur une autre tête. LEON HALEVY. XXXV. A LA FORTUNE D'ANTIUM. DÉESSE qui gouvernes la riante cité d'Antium, toi qui peux élever un mortel du rang le plus obscur, ou changer d'orgueilleux triomphes en funérailles! C'est toi qu'assiège d'une inquiète prière le pauvre habitant des champs; c'est toi, maîtresse des mers, qu'invoque le nautonier qui, de sa carène bithynienne, fatigue les flots de Carpathie. C'est toi qu'implorent le Dace cruel, le Scythe errant, les villes, les nations, le fier habitant du Latium, les mères des rois barbares; c'est toi que craignent les tyrans couverts de pourpre ! Ils ont peur que, d'un pied injurieux, tu ne renverses leur superbe colonne, et qu'une multitude furieuse, appelant aux armes ceux qui se reposent, criant aux armes ! de toutes parts, ne brise leur puissance éphémère ! Devant to marche toujours la cruelle Nécessité, portant dans sa main d'airain des clous énormes, des coins, le croc fatal et le plomb liquide, instrumens de torture. TE Spes et albo rara Fides colit Veste domos inimica linquis. Ar vulgus infidum, et meretrix retro Ferre jugum pariter dolosi. SERVES iturum Cæsarem in ultimos Orbis Britannos et juvenum recens Partibus, Oceanoque rubro. EHEU! cicatricum et sceleris pudet, Fratrumque! Quid nos dura refugimus Ætas? quid intactum nefasti Liquimus? unde manum juventus METU Deorum continuit? quibus 1 XXXVI. IN REDITUM PLOTII NUMIDE. Er thure et fidibus juvat Placare, et vituli sanguine debito Custodes Numidæ Deos, Qui nunc Hesperia sospes ab ultima, On voit, près de toi, l'Espérance, et la Fidélité si rare, couverte d'un voile blanc, qui ne refuse pas d'accompagner le malheur, lorsque, quittant tes somptueux vêtemens, tu abandonnes en ennemie la demeure de la puissance. Mais le perfide vulgaire et la courtisane parjure se retirent alors, avec tous les faux amis, non moins habiles à secouer le joug du malheur, et qui s'enfuient quand il n'y a plus de Falerne au fond des coupes. Conserve-nous les jours de César, prêt à marcher contre les Bretons, derniers habitans du monde ! conserve ce nouvel essaim de guerriers qui doivent porter l'effroi dans l'Orient et sur les bords de la mer Rouge! Hélas! nous rougissons de nos cicatrices, de nos crimes, de nos frères immolés! Age exécrable! devant quel forfait avons-nous reculé? quel crime nous reste-t-il à commettre? de quel objet sacré la crainte des dieux a-t-elle détourné le bras de nos guerriers? quel autel ontils épargné?... Oh! puisses-tu reforger sur une enclume nouvelle nos glaives parricides, et les tourner contre les Massagètes et les Arabes! LÉON HALEVY. XXXVI. SUR LE RETOUR DE PLOTIUS NUMIDUS. QUE l'encens, les chants de la reconnaissance, le sang d'une victime nous acquittent envers les dieux protecteurs qui nous rendent Numidus. Il revient sain et sauf des extrémités de l'Hespérie. Le voilà qui prodigue ses |