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Mânes des Catons, des Brutus,

Revendiquez Rome usurpée;

Ouvrez-vous, grands tombeaux où dorment les Gracchus; Revivez, Émile et Pompée!

Rendez-nous l'antique splendeur

De vos vertus républicaines;
Que la triple tiare, abaissant sa grandeur,
Tombe aux pieds des armes romaines!

Et vous, Germains, réveillez-vous; Au nom de nos communs ancêtres, Redevenez des Francs, et brisez avec nous Le joug de vos orgueilleux maîtres!

Levez-vous; ce n'est qu'aux tyrans
A redouter nos mains guerrières:

Nos mains portent l'effroi dans le palais des grands,
La liberté dans les chaumières.

A l'acier opposez l'acier;

Que la voix des combats décide;
Dans vos robustes mains que le soc nourricier

Soit un glaive tyrannicide!

Le riche fuit l'égalité

Au sein de son vaste héritage;

328 ODE SUR LA GUERRE DE LA LIBERTÉ.

Le pauvre avec ardeur chérit la liberté:
Elle est le seul bien qu'il partage.

Ainsi l'on vit s'humilier

L'Autriche et sa vaine puissance,

Quand d'Egmont et Nassau couraient se rallier Sous le drapeau de l'indigence.

Tels, sous Wasa, ces conquérans
Vengeurs de la Suède avilie,

Guerriers cultivateurs, descendaient par torrens
Des monts de la Dalécarlie.

Tel, en des jours encor plus beaux, S'élevait, sous des mains rustiques, Ce chêne audacieux dont les treize rameaux

Ombrageaient les monts helvétiques.

ODE

SUR LA SITUATION

DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE,

DURANT LA DÉMAGOGIE

DE ROBESPIERRE ET DE SES COMPLICES.

(Prairial, l'an II de la République. — Juin 1794.)

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VAISSEAU de l'État, fais un dernier effort:
Vaisseau, battu par les orages,

Tes mâts sont renversés; viens regagner le
Ces rochers, qu'habite la mort,

Sont témoins d'assez de naufrages.

port:

Vois-tu, le fer en main, le meurtre dans les yeux, Grandir l'anarchie aux cent têtes?

Ainsi du sein des mers, s'élevant jusqu'aux cieux, Jaillit le géant furieux

Que vomit le cap des tempêtes,

Lorsque, précipités par la fureur de l'or,

Les Jasons de Lusitanie,

Souillant de leur empire une onde vierge encor,

Sur l'Océan d'Adamastor

Faisaient voguer la tyrannie.

O de nos jours de sang quel opprobre éternel!
C'est Catilina qui dénonce;

Vergonte et Lentulus dictent l'arrêt mortel;
Tullius est le criminel;

Céthégus est juge, et prononce!

Des forfaits autrefois les vils machinateurs
Conjuraient avec la nuit sombre;

Ils siégent maintenant au rang des sénateurs;
Et les poignards conspirateurs

Ne sont plus aiguisés dans l'ombre.

Le génie indigné baisse un front abattu
Sous l'ignorance qui l'opprime;

Du nom de liberté le meurtre est revêtu;
Et l'audace de la vertu

Se tait devant celle du crime.

Le délateur vendu, pour prix de ses poisons, Baigne dans l'or ses mains avides;

Et des Pères conscrits les respectables noms

Des Marius et des Carbons

Couvrent les tables homicides.

Le peuple est aveuglé par ses vils ennemis;
Des Gracchus la mort est jurée :

Viens, Septimuléius, viens, meurtrier soumis,
Contre l'or qui te fut promis
Échanger leur tête sacrée.

Liberté des Français, que d'infâmes complots
Ont ralenti ta noble course!

Un monstre a dévoré nos fruits à peine éclos;
Le sang s'est mêlé dans tes flots

Si purs, si brillans à leur source.

Sur ton front, jeune encor, dieux! quel souffle infernal Flétrirait tes palmes altières!

Vas-tu donc ressembler à ce fleuve inégal

Qui, de son opulent cristal,

Baigne le nord de nos frontières?

Né sur le Saint-Gothard, au milieu des torrens,
Fils impétueux des montagnes,

Le Rhin, dans sa naissance, ennemi des tyrans,
Des Suisses, des Germains, des Francs,
Fertilise au loin les campagnes.

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