Imágenes de páginas
PDF
EPUB

ÉPIGRAMMES.

I.

SUR LE GUILLAUME TELL DE LEMIERRE.

1788.

LEMIERRE, ah! que ton Tell avant-hier me charma!
J'aime ton ton pompeux et ta rare harmonie;
Oui, des foudres de son génie

Corneille lui-même t'arma.

11.

SUR CADET DEVAUX.

Comme quoi Cadet fit un beau plaidoyer pour réclamer le rétablissement du bûcher et de la roue.

NIVOSE AN IX.

Les vins d'Arcueil et les pommes de terre

De mon génie exerçaient la hauteur;
Mais on verra Cadet législateur:

Paix, Montesquieu, Beccaria, Voltaire!

Chez vous, Français! nul bûcher n'est dressé!
On ne rompt plus! le bon tems est passé.
C'est grand pitié! Cadet braille et s'enroue.
Si vous avez peu de goût pour le jeu,
Si vous craignez d'écarteler un peu,
Soyez humains: accordez-moi la roue.

III.

SUR UN DÉPUTÉ GASCON.

(M. Crassous, membre du sénat.)

AN IX.

Que des humains la faiblesse est étrange!
Dit, l'autre jour, un député gascon.
Depuis neuf ans, émule de Solon,

Avec pitié je vois comme tout change:

Chaque parti devient minorité;

Mais, narguant seul la publique inconstance,

Depuis neuf ans, grâce à ma conscience,

Je suis toujours dans la majorité.

IV.

LES DEUX MISSIONNAIRES.

1804.

Or, connaissez-vous en France

Certain couple sauvageon,

Prisant peu la tolérance: Messieurs La Harpe et Naigeon?

1

Entre eux il s'élève un schisme:
L'un, étant grave docteur,

Ferré sur le catéchisme;

L'autre, athée inquisiteur.

Tous deux braillaient comme pies;
Déistes ne sont leurs saints:

La Harpe les nomme impies;
Naigeon les dit capucins.

A ces oracles suprêmes,
Bonnes gens, soyez soumis
Nul n'aura d'esprit qu'eux-mêmes;
Ils n'ont pas d'autres amis.

Leur éloquence modeste
Amollit les cœurs de fer;
La Harpe a le feu céleste;
Et Naigeon le feu d'enfer.

Partout ces deux Prométhées
Vont créant mortels nouveaux :

La Harpe fait les athées;
Et Naigeon fait les dévots.

V.

SUR MADEMOISELLE RAUCOURT,

JOUANT LE RÔLE DE PHèdre.

O Phèdre! dans ton jeu que de vérité brille!
Oui, de Pasiphaé je reconnais la fille,
Les fureurs de sa mère, et son tempérament,
Et l'organe de son amant.

VI.

LA HARPE, dans un écrit sur la langue révolutionnaire, avait proscrit le verbe FANATISER, et avait posé, comme règle générale, qu'aucun ad

jectif en IQUE ne peut produire un verbe en ISER.

Si par une muse électrique
L'auditeur est électrisé,
Votre muse paralytique
L'a bien souvent paralysé;
Mais, quand il est tyrannisé,
Parfois il devient tyrannique:
Il siffle un auteur symétrique,
Il rit d'un vers symétrisé,
D'un éloge pindarisé,

Et d'une ode anti-pindarique.
Vous avez trop dogmatisé :
Renoncez au ton dogmatique;
Mais restez toujours canonique,
Et vous serez canonisé.

VII.

SUR L'ENTRÉE D'UN VIEIL ABBÉ A L'ACADÉMIE FRANÇAISE.

Ce timballier philosophique,

Admis parmi les vétérans,

Dans le fauteuil académique

Prend la palme des mécréans.

Mais qu'on plaisante ou qu'on raisonne

Sur ce choix tant que l'on voudra :

Il est certain qu'il est mieux là
Qu'il ne fut jamais en Sorbonne.

VIII.

SUR CARION DE NISAS,

Qui venait de faire jouer sa tragédie de PIERRE LE GRAND, à l'époque où Bonaparte fut fait empereur.

1804.

Prince Carion! s'il vous plaît:

Quittez le cothurne tragique;

Vous serez mieux dans le comique :
Vous êtes un si bon valet !

IX.

SUR ROEDERER.

Jean Roederer, ennuyeux journaliste,
De son squelette a fait peindre les traits.

« AnteriorContinuar »