SUR LES DIVERS MÈTRES EMPLOYÉS PAR HORACE. Les mètres employés par Horace dans ses odes sont tous empruntés aux poëtes lyriques de la Grèce, dont il fut chez les Romains le premier ou du moins le plus digne imitateur. Nous étudierons d'abord ces mètres en eux-mêmes; nous passeront ensuite en revue les différentes combinaisons à l'aide desquelles Horace a formé les strophes de ses odes. DES MÈTRES CONSIDÉRÉS ISOLÉMENT. On peut diviser en cinq classes les mètres d'Horace, suivant qu'ils ont une origine dactylique, ïambique, trochaïque, choriambique ou ionique. Outre ces mètres, qu'on peut appeler mètres simples, on trouve encore dans Horace des mètres composés, c'est-à-dire qui appartiennent à deux classes à la fois. I. MÈTRES SIMPLES. 1. MÈTRE DACTYLIQUE. Les vers dactyliques sont ainsi nommés parce qu'ils sont entièrement composés de dactyles ou parce que le dactyle (– ~ ~ ) domine dans leur composition. Ce sont les suivants : 4. Le vers dactylique par excellence, qu'on appelle aussi vers héroïque, ou vers hexamètre. Il se compose de six pieds, 1. Dans cette dénomination, comme dans celles de dimètre, trimètre, appliquées aux vers dactyliques, le mot mètre ne désigne pas la réunion de deux pieds, mais un pied isolé. dont les quatre premiers peuvent être indifféremment des dactyles ou des spondées, à condition que le cinquième pied soit toujours un dactyle et le sixième un spondée : Diffu- gērě ni-vēs, rědě-|ūnt jām | grāmină | campis. Ce vers a été employé par Horace dans quelques-unes de ses épodes. C'est aussi le vers des satires et des épîtres. Il est beaucoup trop connu pour qu'il soit besoin de s'y appesantir. 2. Le vers dactylique dimètre ou vers adonien. Ce vers se compose d'un dactyle et d'un spondée; il présente, par conséquent, les deux derniers pieds de l'hexamètre. Căsăris ültör. 3. Le vers dactylique trimètre catalectique1 ou petit archiloquien. Ce vers se compose de deux dactyles et d'une syllabe; il présente, par conséquent, le second hémistiche du vers pentamètre : Pulvis ět | umbră să-müs. 4. Le vers dactylique tétramètre, ou vers tétramètre héroïque, ou vers phalisque. Ce vers se compose des quatre premiers pieds du grand vers dactylique: Ibimus o soci-li comi-tesque. Sic tri-stēs āf-fātŭs ǎ-|mīcðs. Non-seulement le vers dactylique tétramètre se trouve employé seul dans les odes d'Horace, mais il concourt encore, comme nous le verrons plus loin (26), à former le grand vers archiloquien. 2. MÈTRE IAMBIQUE. Les vers iambiques sont ainsi nommés parce qu'ils sont entièrement composés d'ïambes (~~), ou parce que l'ïambe domine dans leur composition. Les vers ïambiques sont : 5. Le vers iambique dimètre. Ce vers se compose de quatre pieds: Inar-sit a-stůō-|siüs. 1. Le mot catalectique indique que le vers est incomplet; et, en effet, il manque une syllabe pour compléter le quatrième pied. 2. Dans cette dénomination, le mot mètre désigne la réunion de deux pieds: un vers dimètre est donc un vers qui se compose de quatre pieds. Seulement il n'est pas nécessaire que les quatre pieds soient toujours des ïambes, comme dans le vers que nous venons de citer. Le vers ïambique admet, aux pieds impairs, le spondée (--) et le dactyle (-~ ~); il admet aussi, même aux pieds pairs, le tribraque(). Exemples; Imbres | nives-qué còm-|pårät. Et Ap-pĭām mānnīs | tĕrit. 6. Le vers ïambique trimètre. Ce vers se compose de six pieds: Bĕā-|tůs il-|lĕ qui | procul | něgō-|tïïs. Il admet aux pieds pairs et aux pieds impairs les mêmes substitutions que l'ïambique dimètre, et de plus, l'anapeste (~ ~ -). Exemples: Quandō | repō- stūm Ca- cůbum ad | fēstās | dăpĕs. Pǎvidūm-quě lěpo- rem ět ad-věnām | lăquěō | grůěm. 7. Le vers ïambique trimètre catalectique1, Ce vers se compose de cinq pieds et d'une syllabe : Měa | rěni-dět în | domō lăcu-năr, Ce vers admet les mêmes substitutions que les deux précédents. Exemples: Trähunt-que sic-cās mā-china | cărī-|näs. 1. Ce vers est aussi appelé tambico-trochatque par quelques prosodistes, qui le regardent comme composé de deux ïambes, puis d'une syllabe longue formant césure, et enfin d'un ithyphallique : Trǎhunt-[quě sīc-cās māchi-Inæ că-|rīnas. Jām tē❘ premēt | nox fa-|bŭlæ-quĕ mā-\nës. 8. Le vers ïambique dimètre hypermètre1. Ce vers se compose de quatre pieds et d'une syllabe; il admet les mêmes substitutions que les trois précédents : Stěte-rě cau-sæ cur | pĕri-|rent. Ce vers se nomme aussi quelquefois vers alcaïque ennéasyllabe; il est, en effet, le troisième vers de la strophe alcaïque. 3. MÈTRE TROCHAÏQUE. Les vers trochaïques sont ainsi nommés parce qu'ils sont entièrement composés de trochées (~~), ou parce que le trochée domine dans leur composition. Les vers trochaïques sont : 9. Le vers ithyphallique, qui se compose de trois trochées : Vēris et Fă-vōnt. Dans les odes d'Horace, ce vers ne se rencontre pas isolé : il sert à former le grand vers archiloquien (20). 10. Le vers trochaïque trimètre catalectique. Ce vers se compose de quatre pieds; mais le dernier est incomplet et manque d'une syllabe: Trudi- tur di-lēs di-lě. 4. MÈTRE CHORIAMBIQUE. Le choriambe est un pied composé de deux syllabes brèves entre deux syllabes longues (--); il présente donc un chorée ou trochée et un ïambe. Les vers choriambiques, c'està-dire ceux dans lesquels le choriambe domine, sont : 1. Cette dénomination indique qu'il a une syllabe de plus que l'ïambique dimètre ordinaire (ὑπέρ, μέτρον). 44. Le vers aristophanien. Ce vers se compose d'un choriambe, suivi d'une dipodie' ïambique catalectique Lydia, dic per ōm-nēs. 12. Le vers choriambique trimètre catalectique, ou vers anacréontique, ou grand vers saphique. Ce vers se compose de deux choriambes, précédés d'une dipodie trochaïque et suivis d'une dipodie ïambique catalectique. Il faut observer seulement que la dernière syllabe de la dipodie trochaïque est toujours longue : Sæpe | trans fi-nēm jǎcůlō | nōbilis ex-pědi-to. 43. Le vers choriambique monomètre hypermètre ou vers phérécration. Ce vers se compose d'un choriambe hypermètre, c'est-à-dire allongé d'une syllabe; ce choriambe est précédé d'un spondée : Crās dō-nāběrĭs hæ-|dð. 44. Le vers choriambique dimètre catalectique ou vers glyconique. Ce vers se compose d'un choriambe, précédé d'un spondée ou d'un trochée, et suivi d'un ïambe : Nil mōr-talibus ār-důi ěst. Tęūcerēt Sthěnělūs | sciens. 45. Le vers choriambique trimètre catalectique ou petit asclépiade. Ce vers se compose de deux choriambes, précédés d'un spondée et suivis d'un ïambe : Mācē-nās, ǎtǎvīs | ēdĭtě rē-gibus. 46. Le grand asclépiade. Ce vers se compose de trois choriambes, précédés d'un spondée et suivis d'un ïambe. Nūllām, | Vārě, såcrā | vitě prĭūs | sēvěrĭs ār-borěm. 5. MÈTRE IONIQUE. Le mètre ionique tire son nom du pied ionien, qui est formé 1. Dipodie, c'est-à-dire réunion de deux pieds (Siç, Rous). 2. Ce fait de la présence d'un trochée au premier pied suffit pour empêcher qu'on ne rapporte ce vers, comme on le fait quelquefois, au mètre dactylique. |