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principal, en faifant quelques détours & trouvant des obstacles dans fa marche. Les intervalles qui font entre les petites collines, ne doivent jamais être en ligne droite, ni même en lignes courbes régulieres on les fera tourner doucement fur euxmêmes, en variant leurs formes & leurs dimenfions; une grande colline fur-tout vue d'en bas, perd beaucoup de fa beauté. Si le fommet eft trop uniformément continué, de petites éminences qui divifent ce fommet, ont affez peu de fuccès, parce qu'elles paroiffent trop ifolées & n'être que l'ouvrage de l'art. L'effet que l'on fe propose, peut être produit par une grande éminence, plus basse dans certains endroits que dans d'autres, & tenant à la colline par plufieurs points; on parviendroit au même but, en creufant un canal ou un follé fur la partie fupérieure, lequel couperoit la continuité de la ligne, ou en avançant d'un côté le fommet de la montagne & le reculant de l'autre, ou en formant un fecond fommet un peu bas d'un côté, & élevant le terrein dans une direction différente de la pente générale, fans lui être oppofée. C'est par de tels moyens qu'on détournera l'attention qui fe porte fur le défaut; mais ce feroit corriger un défaut par un plus grand, que de divifer la ligne en deux parties égales: ce feroit ajouter une

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feconde uniformité, fans détruire la premiere; car la régularité décele toujours l'art ; & l'art une fois apperçu, détruit le preftige. Notre imagination joint habilement les parties défunies, & ne préfente plus que l'idée d'une ligne continue.

I X.

Du contrafte.

PAR quelque objet que ce foit que vous rompiez la ligne, il faut que cette ligne foit rompuc obliquement. Une divifion à angles droits, produit l'uniformité, il n'y a plus de contrafte entre les parties divifées; au lieu que fi elle eft oblique, ces parties auront des inégalités refpectives. Les lignes paralleles ont le même défaut que celles qui fe joignent à angles droits. Quoique ces deux efpeces de lignes foient parfaites en elles-mêmes lorfqu'elles fe correfpondent, elles forment des figures dont les côtés ne contraftent point. C'est d'après le même principe qu'on introduira quelquefois certaines formes, moins pour leur beauté propre, que par leur contrafte heureux avec celles qui les environnent. Elles s'embelliffent mutuellement, & font enfemble un compofé plus agréable, que fi elles avoient été beaucoup plus belles, mais auffi plus plus femblables.

Une des raifons pour lefquelles les fcenes, dont le caractere eft la douceur, font rarement intéresfantes, c'eft que, malgré la variété dont elles font fufceptibles, elles n'admettent que peu de contraftes, encore font-ils très-foibles. L'abondance de la variété nous réjouit ; mais nous ne ferons. frappés que par la force du contrafte. Ces deux genres devroient être abondamment répandus dans les fcenes les plus grandes & les plus hardies d'un jardin, fur-tout dans celles qui font formées par un affemblage de plufieurs parties diftinctes, confidérables; ainfi, lorfque plufieurs élévations paroiffent les unes derriere les autres, une jolie colline qui s'offre en perfpective au-deffus d'un petit enfoncement oblique, produira un bel effet qu'eût détruit l'uniformité. Enfin, fi vous en exceptez quelques cas particuliers, une parfaite reffemblance entre des lignes qui fe croifent, ou qui font oppofées, ou qui s'élevent les unes derriere les autres, ne produit qu'une compofition pauvre, uniforme & défagréable.

X.

Des effets extraordinaires. Defcription de la colline

d'Ilam.

L'APPLICATION de quelques-unes des obfervations précédentes aux grandes fcenes de la nature, me conduiroit à préfent trop loin (1): il est d'ailleurs néceffaire de parler auparavant des autres parties dont ces fcenes font compofées, c'est-à-dire, des bois, des eaux, des rochers & des bâtimens. Les regles que j'ai données, fi tant eft que mes obfervations méritent le nom de regles, font principalement applicables à un terrein qu'on cultive à la bêche; elles ne font que générales fans être

(1) Je défirerois cependant que l'auteur l'eût faite, cette application. Son ouvrage en feroit devenu plus intéressant & plus intelligible. La brièveté eft un grand mérite, mais il ne faut pas qu'elle foit jointe à l'obfcurité, ni,s'il fe peut,à la féchereffe. Si l'auteur répondoit que les diverses sections de fon ouvrage fe fervent mutuellement de commentaire, ce qui n'eft pas entièrement exact, je demanderai s'il y a beaucoup de lecteurs qui fe donnent la peine de faire ce rapprochement? Au refte, c'est la fection du terrein qui eft la plus abftraite; l'auteur a jetté ailleurs beaucoup plus de clarté & d'agrément.

univerfelles. Il y en a peu qui ne fouffrent des exceptions, & très-peu même dont on ne puisse fe difpenfer dans certains cas. Cependant la plupart de ces obfervations, même dans les fcenes qui bravent les efforts de l'art, peuvent nous diriger dans le choix des parties que nous pouvons montrer ou cacher, quoique nous ne puiffions les altérer. Mais alors même il y a une précaution à prendre, qu'on a déja eu en vue plus d'une fois dans cet ouvrage, & qu'il faut toujours avoir préfente; c'est de ne jamais faire ufage des confidérations générales dans les grands effets extraordinaires, qui s'élevent au-deffus de toutes les regles, & doivent peut-être à ces écarts leurs plus grandes. beautés. La fingularité caufe au moins la surprise, & la surprise est liée à l'étonnement. Ces effets ne font pourtant pas dus uniquement à des objets d'une grandeur énorme, mais ordinairement à la fublimité de la maniere & du caractere, dans une étendue telle qu'elle puiffe être modifiée par un travail médiocre, & renfermée dans les bornes d'un jardin; ainfi les précautions peuvent n'être pas inutiles dans des limites auffi refferrées. Mais la nature va infiniment plus loin que l'art; & dans les fcenes fauvages, où elle jouit le plus de fa liberté,

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