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mêmes rapports, d'où il naît une variété de formes qu'un bois ou un bocage, quelque diverfifiés qu'ils fuffent, ne fauroient préfenter. Ces formes ne peuvent pas toujours être également agréables: & peut-être même trop d'efforts & de foins pour les rendre belles, empêcheroient qu'elles ne le fuffent; c'est un effet fouvent dû à un heureux hafard. Examinez cependant l'effet de vos massifs de chaque point de vue principal, pour juger s'il n'est pas néceffaire d'y faire, ou un enfoncement, ou une faillie, ou quelqu'autre changement dans la ligne extérieure.

Cependant, malgré tous les avantages attachés à cette efpece de plantation, il faut fouvent l'exclure, lorfqu'elle eft commandée par une éminence voifine. Des maffifs vus d'en haut, perdent quelques-unes de leurs principales beautés ; & lorfqu'ils font nombreux, ils décelent l'art dont on les foupçonne toujours. Ils ne préfentent plus la furface d'un bois ; & tous les effets réfultans de leurs rapports font entiérement perdus. Il eft difficile qu'il y ait de la grandeur dans un point de vue trop fourni de maffifs: ainfi à moins qu'ils ne foient affez diftincts pour former comme autant d'objets ifolés, ou assez rapprochés les uns des autres pour ne former qu'une feule maffe, ils embelliront rarement une perpective.

X X V.

Des arbres ifolés.

LES fituations qui conviennent aux arbres ifolés, font ordinairement les mêmes que celles des maffifs. Elles feront fouvent déterminées par la feule confidération de la proportion entre l'objet & le lieu qu'il doit occuper; & fi l'effet desiré peut être produit par un feul arbre, il plaît par la fimplicité du moyen. Quelquefois on lui donnera la préférence uniquement pour la variété; & onpeut en faire ufage pour marquer un point dans une perspective, où deux ou trois points font déja diftingués par des maffifs. Il arrive même très-fouvent qu'on met un arbre à la place des maflifs; il peut être un objet ifolé, rompre la continuité d'une ligne, ou décorer un grand efpace: il n'y a qu'un feul effet réfultant des maffifs, que des arbres ifolés ne puiffent produire jufqu'à un certain degré; c'est que, quelque nombreux qu'ils foient, ils ne s'uniront jamais en grandes maffes, & qu'il faut obferver de les tenir à de plus grandes diftances. Répandus autour d'un grand tapis-verd, ils lui donnent une forme agréable; & pour cet effet, il faut que chaque arbre foit placé, relativement aux autres, de la

maniere la plus avantageufe : ils peuvent avoir dif férentes directions, & former tous ensemble des deffeins très-agréables: on peut auffi ménager de petites clarieres au milieu de plufieurs arbres un peu plus écartés que les autres; ce qui jettera fur ce point de vue beaucoup de beauté & de variété, Les lignes qu'ils tracent font plus faibles que celles que décrivent de plus grandes plantations; mais auffi leurs formes leur font propres, l'on n'y fent point l'art & le travail; & toute difpofition, pourvu qu'elle foit irréguliere, y paroît naturelle.

Ce qu'il faut d'abord obferver dans les arbres isolés, c'est leur fituation, parce que c'est de la différence de leurs diftances, qu'ils tirent leur principale variété. Quant au choix de leur forme, c'est d'après leurs efpeces qu'il faut fe décidert ce qui les rend toujours intéreslans, c'est la grandeur & la beauté du feuillage; quelquefois la feule groffeur, & de tems en tems quelque fingularité. Leur fituation déterminera fouvent l'efpece dont il faut faire ufage. S'ils font placés au-devant d'un bois dont l'alignement foit trop uniforme, uniquement pour le diverfifier, ils feront ordinairement femblables aux arbres de ce bois. Sans cette précaution, il n'y auroit aucune liaison, & ils ne produiroient aucun changement fur la ligne extérieure; mais

s'ils ont été placés comme objets isolés, il faut qu'ils foient parfaitement diftingués,par leur forme & leur verdure, des plantations qu'ils environnent. Ce choix, après tout, fe borne très-fouvent aux arbres qui font fur le lieu, fur- tout lorsque la perfpetive eft fort étendue. De jeunes maffifs, dès le premier jour qu'ils ont été plantés, ont un effet fenfible, qui devient bientôt très-confidérable; mais un jeune arbre ifolé eft comme nul pendant plufieurs années: il vautdonc quelquefois mieux conferver un arbre déjavenu, quoiqu'il n'ait pas précisément toutes les qualités requifes, que d'en planter un autre à fa place, qui pourroit devenic un objet plus beau oumieux fitué, mais dont on ne jouiroit que dans un avenir fort éloigné.

DESEA U X.

X X V I.

Des effets des eaux & de leurs différentes efpecesi

QUA

UAND on confidere les matériaux que met en œuvre l'art de former des jardins, le terrein & les bois fe préfentent d'abord, & les eaux viennent enfuite. Quoique les eaux ne foient pas d'une néceffité indifpenfable dans une belle compofition, cependant elles s'offrent fi fouvent, & jettent tant d'éclat dans une fcene, qu'on regrette toujours qu'e

'elles manquent: on ne peut fuppofer un terrein fort étendu, & on imagineroit difficilement un petit efpace, où elles ne fuffent pas un des principaux agrémens. Elles s'accommodent à toutes les fituations; elles font l'objet le plus intéressant dans un payfage, & la partie la plus délicieuse d'une retraite: elles fixent l'attention dans l'éloignement, invitent à s'approcher, & charment lorsqu'on eft près: elles donnent, pour ainfi dire, du coloris à une expofition ouverte : elles animent un ombrage, adouciffent l'horreur d'un défert, & enrichiffent le point de vue le plus varié & le plus fourni. Pour

la

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