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s'avancent les collines, le contrafte de leurs forme & leurs accompagnemens, jettent la plus grande beauté fur ce côté de la plaine. L'extrêmité de l'autre côté étoit autrefois une pente toute plate, & coupée par un angle très-aigu, objet choquant pour la vue. Elle est maintenant divifée en petites élévations remarquables par les jolis grouppes d'arbres qui les féparent, & qui, écartés les uns derriere les autres, forment une ondulation dans la perspective extrêmement agréable. Ils font plus que de cacher l'angle aigu qui commence la pente: ils changent en beauté une difformité, & contribuent beaucoup à l'embellissement de cette scene intéreffante, dont le paysage eft peut-être un des plus beaux & des plus variés qu'on puisse desirer dans un jardin, quoique la furface plate y domine.

I I I.

Du terrein convexe & du terrein concave.

CEPENDANT une plaine n'est point intéressante par elle-même. Pour peu qu'elle s'écarte de l'uniformité, elle change de nature; tant qu'elle refte dans l'état de plaine, toute fa beauté & fa variété dépend des objets dont elle eft environnée; au lieu les formes convexe ou concave font en gé

que

néral fort agréables, & peuvent fe combiner à l'infini. Il faut feulement éviter les figures parfaitement régulieres. Le demi-cercle n'est jamais fupportable; mais de petites portions de grands cercles mêlées enfemble, des lignes à courbure douce qui ne faffent point partie d'un cercle, de petits enfoncemens qui ne s'écartent fort peu du niveau, des élévations très-applaties au fommet, font ordinairement les formes les plus agréables.

que

Dans un fol bien expofé, la forme concave doit ordinairement dominer; quoique renfermée dans la même enceinte, elle préfente plus de furface que la forme convexe; tous les côtés de celle-ci ne peuvent se voir en même tems, à un très-petit nombre de fituations près; au lieu qu'il n'y a que très-peu de pofitions où quelques parties d'un enfoncement foient cachées. La terre femble avoir été accumulée pour élever l'une, & creufée pour abaisser l'autre. La forme concave paroît donc la plus légere, & prefque toujours la plus élégante.Il est même bien difficile qu'une pente convexe puisse fubfifter jufqu'en bas, fans être coupée par de petits enfoncemens qui diminuent beaucoup de la pefanteur de la maffe. Il y a cependant des pofitions. où la forme convexe doit être préférée : un en

deffous du fommet d'une colline, l'appauvrit & la dégrade. Une hauteur efcarpée ne paroît jamais avoir de liaison avec une concavité qui eft au deffus d'elle, & l'angle aigu qui marque leur féparation, eft très-fenfible: pour les joindre, il faut arrondir ou du moins applatir cet angle, ce qui, au fond, n'eft autre chose qu'interpofer la convexité ou le

niveau.

I V.

Du rapport qu'ont entr'elles les parties d'un terrein.

DAN ANS un terrein que l'on a difpofé, l'harmonie des parties entr'elles, eft peut-être ce qui mérite. le plus de confidération. Sans cela une éminence n'eft qu'un monceau informe, un enfoncement devient un creux défagréable. L'art se montre partout, & rien ne paroît mis à fa place. Sur la grande échelle de la nature, les inégalités de toute efpece peuvent être à la vérité fi confidérables par ellesmêmes, que le rapport des unes avec les autres devienne prefque indifférent; mais fur la petite échelle d'un jardin, fi les parties ne fe rapportent pas les unes aux autres, l'effet de l'ensemble eft marqué; or cet enfemble eft effentiel pour donner

un air de grandeur & d'importance à un terrein circonfcrit qui doit être très-varié & ne peut être très-fpacieux. Ajoutons que dans la nature les petites inégalités font ordinairement mêlées enfemble, & que toutes les lignes de féparation ont été effacées par fucceffion de tems. Ainfi, lorfque dans un terrein qui eft l'ouvrage de l'art, on les laisse subsister, ce terrein paroît artificiel.

Lors même que l'art ne fe cache point, une interruption marquée choque l'œil. L'ufage d'un foffé fera donc uniquement de fervir de défense & de limites, fans nuire à la vue. Il empêchera qu'on ne mêle le jardin avec la campagne, dont les troupeaux, la culture, & les différens objets ne quadrent point avec ceux qui compofent un jardin, & doivent en être féparés par une espece de retranchement affez profond. Un fossé n'empêche point que d'un boulingrin le mieux foigné, on ne porte fa vue fur un champ de bled, un grand chemin, une commune, quoiqu'il marque trèsdiftinctement une ligne de féparation. On peut très-bien fe donner pour perspective, des objets qui ne peuvent ou ne doivent pas être dans le jardin, comme une églife, un moulin, la maifon de campagne de fon voifin, une ville, un village;

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élevé

que

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féparés du jardin, on ne peut s'accoutumer à voir les points de divifion.Le déguisement le plus fimple eft de tenir le bord du foffé du côté du jardin plus l'autre, enforte que celui-ci ne puiffe être vu que de fort près; mais cette précaution n'est pas toujours fuffifante, parce que la ligne de division paroît toujours, quelque foible qu'elle fair, fi elle eft tracée uniformément. Il faut donc que cette ligne foit interrompue. Des monticules peu élevées, mais étendues, produifent cet effet: on peut même quelquefois croifer le foffé, comme lorfque le terrein s'enfonce du côté de la campagne, & que la pente commence dès le jardin. Les arbres qui bordent les deux côtés du foffé, & paroiffent faire partie d'un même bois ou d'un même bocage, effaceront fouvent la trace de féparation. C'est par de tels moyens & autres femblables, que cette trace peut être cachée ou déguisée; non dans le deffein de tromper (on y réuffit rarement), mais conferver la continuité de la fur

pas

face.

pour

Si la ligne de féparation eft défagréable, même relativement aux objets qui ne fouffrent point d'union, que fera-ce donc lorfqu'elle rompt la connexion entre les différentes parties d'un même sol? Connexion qui confifte dans la liaison de chaque

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