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dolor! interiere simul Joci dicaces, lascivi Risus, Gratiæ decentes, doctæ Camenæ. Lugete, o quibus cordi est ingenuus lepos, natura nuda et simplex, incompta et sine fuco elegantia! Illi, illi uni per omnes doctos licuit esse negligentem. Politiori stylo quantum præstitit aurea negligentia! Tam caro capiti quantum debetur desiderium! Lugete, Musarum alumni. Vivunt tamen, æternumque vivent carmini jocoso commissæ veneres, dulces nugæ, sales attici, suadela blanda atque parabilis; neque Fontanum recentioribus juxta temporum seriem, sed antiquis, ob amœnitates ingenii adscribimus. Tu vero, lector, si fidem deneges, codicem aperi. Quid sentis? Ludit Anacreon. Sive vacuus, sive quid uritur Flaccus, hic fidibus canit. Mores hominum atque ingenia fabulis Terentius ad vivum depingit; Maronis molle et facetum spirat hoc in opusculo. Heu! quandonam mercuriales viri quadrupedum facundiam æquiparabunt!

COMPOSÉS POUR L'ÉDUCATION

1

DE MGR LE DUC DE BOURGOGNE 1

ACHILLE ET HOMÈRE

Manière aimable de faire naître dans le cœur d'un jeune prince l'amour des belles-lettres et de la gloire.

ACHILLE. Je suis ravi, grand poëte, d'avoir servi à t'immortaliser. Ma querelle contre Agamemnon, ma douleur de la mort de Patrocle, mes combats contre les Troyens, la victoire que je remportai sur Hector, t'ont donné le plus beau sujet de poëme qu'on ait jamais vu.

HOMERE. J'avoue que le sujet est beau, mais j'en aurois bien pu trouver d'autres. Une preuve qu'il y en a d'autres, c'est que j'en ai trouvé effectivement. Les aventures du sage et patient Ulysse valent bien la colère de l'impétueux Achille.

ACHILLE. Quoi! comparer le rusé et trompeur Ulysse au fils de Téthys, plus terrible que Mars! Va, poëte ingrat, tu sentiras...

HOMERE. Tu as oublié que les ombres ne doivent point se mettre en colère. Une colère d'ombre n'est guère à craindre. Tu n'as plus d'autres armes à employer que de bonnes raisons.

1. Pour compléter ce volume et le bien remplir, nous le terminons par les Dialogues des morts, dont nous donnons ici la fleur dans ce choix fait avec beaucoup de soin.

ACHILLE. Pourquoi aussi viens-tu me désavouer que tu me dois la gloire de ton beau poëme? L'autre n'est qu'un amas de contes de vieilles; tout y languit; tout sent son vieillard dont la vivacité est éteinte et qui ne sait point finir.

HOMERE. Tu ressembles à bien des gens qui, faute de connoître les divers genres d'écrire, croient qu'un auteur ne se soutient pas quand il passe d'un genre vif et rapide à une autre plus doux et plus modéré. Ils devroient savoir que la perfection est d'observer toujours les divers caractères, de varier son style suivant le sujet, de s'élever ou de s'abaisser à propos, et de donner, par ce constraste, des caractères plus marqués et plus agréables. Il faut sonner de la trompette, toucher de la lyre et jouer même de la flûte champêtre. Je crois que tu voudrois que je peignisse Calypso avec ses nymphes dans sa grotte, ou Nausicaa sur le rivage de la mer, comme les héros et les dieux mêmes combattant aux portes de Troie. Parle de guerre, c'est ton fait, et ne te mêle jamais de décider sur la poésie en ma présence.

ACHILLE. O que tu es fier, bonhomme aveugle! Tu te prévaux de ma mort.

HOMERE. Je me prévaux aussi de la mienne. Tu n'es plus que l'ombre d'Achille, et moi je ne suis que l'ombre d'Homère.

ACHILLE. Ah! que ne puis-je faire sentir mon ancienne force à cette ombre ingrate!

HOMERE. Puisque tu me presses tant sur l'ingratitude, je veux enfin te détromper. Tu ne m'as fourni qu'un sujet que je pouvois trouver ailleurs; mais, moi, je t'ai donné une gloire qu'un autre n'eût pu te donner et qui ne s'effacera jamais.

ACHILLE. Comment! tu t'imagines que sans tes vers le grand Achille ne seroit pas admiré de toutes les nations et de tous les siècles?

HOMERE. Plaisante vanité, pour avoir répandu plus de sang qu'un autre au siége d'une ville qui n'a été prise qu'après ta mort! Hé, combien y a-t-il de héros qui ont vaincu de grands peuples et conquis de grands royaumes! cependant ils sont dans

les ténèbres de l'oubli; on ne sait pas même leurs noms. Les Muses seules peuvent immortaliser les grandes actions. Un roi qui aime la gloire la doit chercher dans ces deux choses: premièrement, il faut la mériter par la vertu, ensuite se faire aimer par les nourrissons des Muses, qui peuvent les chanter à toute la postérité.

ACHILLE. Mais il ne dépend pas toujours des princes d'avoir de grands poëtes: c'est par hasard que tu as conçu, longtemps après ma mort, le dessein de faire ton Iliade.

HOMÈRE. Il est vrai; mais, quand un prince aime les lettres, il se forme pendant son règne beaucoup de poëtes. Ses récompenses et son estime excitent entre eux une noble émulation; le goût se perfectionne. Il n'a qu'à aimer et qu'à favoriser les Muses, elles feront bientôt paroître des hommes inspirés pour louer tout ce qu'il y a de louable en lui. Quand un prince manque d'un Homère, c'est qu'il n'est pas digne d'en avoir un; son défaut de goût attire l'ignorance, la grossièreté et la barbarie. La barbarie déshonore toute une nation et ôle toute espérance de gloire durable au prince qui règne. Ne sais-tu pas qu'Alexandre, qui est depuis peu descendu ici-bas, pleuroit de n'avoir point un poëte qui fit pour lui ce que j'ai fait pour toi? c'est qu'il avoit le goût bon sur la gloire. Pour toi, tu me dois tout, et tu n'as point de honte de me traiter d'ingrat! Il n'est plus temps de s'emporter; ta colère devant Troie étoit bonne à me fournir le sujet d'un poëme; mais je ne puis chanter les emportements que tu aurois ici, et ils ne te feroient point d'honneur. Souviens-toi seulement que la Parque t'ayant ôté tous les autres avantages, il ne te reste plus que le grand nom que tu tiens de mes vers. Adieu. Quand tu seras de plus belle humeur je viendrai te chanter dans ce bocage certains endroits de l'Iliade par exemple, la défaite des Grecs en ton absence, la consternation des Troyens dès qu'on te vit paroître pour venger Patrocle, les dieux mêmes étonnés de te voir comme Jupiter foudroyant. Après cela, dis, si tu l'oses, qu'Achille ne doit point sa gloire à Homère.

ULYSSE ET ACHILLE

Caractère de ces deux guerriers.

ULYSSE. Bonjour, fils de Téthys. Je suis enfin descendu, après une longue vie, dans ces tristes lieux, où tu fus précipité dès la fleur de ton âge.

ACHILLE. J'ai vécu peu, parce que les destins injustes n'ont pas permis que j'acquisse plus de gloire qu'ils n'en veulent accorder aux mortels.

ULYSSE. Ils m'ont pourtant laissé vivre longtemps parmi des dangers infinis, d'où je suis toujours sorti avec honneur.

ACHILLE. Quel honneur de prévaloir toujours par la ruse! Pour moi, je n'ai point su dissimuler: je n'ai su que vaincre. ULYSSE. Cependant j'ai été jugé après ta mort le plus digne de porter tes armes.

ACHILLE. Bon! tu les as obtenues par ton éloquence et non par ton courage. Je frémis quand je pense que les armes faites par le dieu Vulcain, et que ma mère m'avoit données, ont été la récompense d'un discoureur artificieux.

ULYSSE. Sache que j'ai fait plus que toi. Tu es tombé mort devant la ville de Troie, qui étoit encore dans toute sa gloire : et c'est moi qui l'ai renversée.

ACHILLE. Il est plus beau de périr par l'injuste courroux des dieux après avoir vaincu ses ennemis, que de finir une guerre en se cachant dans un cheval, et en se servant des mystères de Minerve pour tromper ses ennemis.

ULYSSE. As-tu donc oublié que les Grecs me doivent Achille même? Sans moi, tu aurois passé une vie honteuse parmi les filles du roi Lycomède. Tu me dois toutes les belles actions que je t'ai contraint de faire.

ACHILLE. Mais enfin je les ai faites, et toi tu n'as rien fait que des tromperies. Pour moi, quand j'étois parmi les filles de Lycomède, c'est que ma mère Téthys, qui savoit que je devois périr au siége de Troie, m'avoit caché pour sauver ma vie. Mais toi

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