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de tous, dans une affaire qui dépend du goût, il y a moins qu'on n'imagine de ceux qui, jusqu'à présent, nous ont donné, Horace, qui soient d'accord sur des signes de ponctuation qu'on s'attendroit à voir souvent copiés d'une édition dans plusieurs autres. Ainsi, et comme on pourra s'en assurer dans le tableau même, le judicieux M. Didot diffère, pour sa ponctua tion de cette première ode, 14 fois d'Elzevier, 13 fois de Sanadon, 10 fois de Baskerville, 1 fois de Valart, 7 fois de M. Binet et 14 fois de M. Achaintre; pendant que M. Achaintre diffère 10 fois de M. Binet, etc. etc. Il y a plus; depuis l'invention du plus utile, mais du plus dangereux des arts, vers le milieu du 15o. siècle, Horace a été imprimé plus de 40 fois dans les 30 dernières années de ce siècle et au moins 80 fois dans le 16., 42 fois dans le 17°. et 64 dans le dernier; mais je doute que, parmi ces 226 éditions (sans compter les réimpressions qui ont été données de certaines), il y en ait deux qui présentent les 36 vers de cette première ode avec les mêmes points.

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Que je prouve la possibilité d'une chose qui doit paroître extraordinaire. Qui ne croiroit pas que les deux passages suivans, dans la même ode et à trois vers l'un de l'autre, sont ponctués de la même manière, dans telle ou telle édition, et que toutes les éditions sont d'accord sur une question si simple de la ponctuation?

Divite me scilicet artium

Quas aut Parrhasius protulit aut Scopas.

Od. 8. lib. 4. v. 5.

Nec tibi talium

Res est aut animus deliciarum egens.

Id. ib. v. 9.

On verra, par mon Tableau, que les deux vers ne sout pas ponctues de même par M. Didot; que Baskerville y diffère de deux points; que Sanadon n'est d'accord ni avec l'un ni avec l'autre ; qu'Elzevier a une quatrième manière et Valart une autre encore d'écrire deux passages de la même nature: protulit aut; est aut.

Certainement, la fatale science des ambes et des ternes auroit difficilement apporté un plus grand nombre de combinaisons

dans la ponctuation de ces deux passages; et on croira, j'imagine, que la cinquième manière, adoptée par Valart qui n'a ponctue ni l'un ni l'autre, est la seule bonne.

J'ai même eu occasion de vérifier quelque chose de bien plus remarquable: car j'ai examiné plus de 60 éditions de Télémaque, pour préparer la mienne, et je n'en ai trouvé aucune qui fût absolument conforme à une autre, dans la ponctuation de certains alinéa de cet ouvrage.

Cependant, je dois ajouter qu'il n'y a, assurément, pas de signe, dans la ponctuation que je propose ici, non plus que dans celle que j'ai suivie pour mon Télémaque, qui ne se trouve employé dans le même passage et de la même manière par quelques-uns des différens éditeurs ou imprimeurs, suivant leur méthode de le ponctuer; de sorte qu'on ne peut pas m'accuser d'avoir rien innové dans ma ponctuation particulière.

Si le lecteur prend la peine de donner quelque attention au Tableau comparatif, il sera persuadé, j'espère, que la ponctua

tion proposée pour cette première ode d'Horace, outre les cinq fois qu'elle est, peut-être, absolument nécessaire à l'éclaircissement du sens, n'est pas d'un mince mérite dans d'autres endroits de ce peu de vers. On conciliera, si l'on peut, cette qualification dédaigneuse de l'abbé Girard avec ses propres phrases, à l'honneur de la ponctuation, que j'ai distinguées par le caractère italique et capital, dans le passage

suivant :

» Il est très-vrai que, par rapport à la » pureté du langage, à la netteté de la » phrase, à la beauté de l'expression, à la » délicatesse et à la solidité des pensées, la » ponctuation n'est que d'un mince mérite... » Mais... la ponctuation soulage et con» duit le lecteur. Elle lui indique les » endroits où il faut se reposer pour pren» dre sa respiration, et combien de temps » il y doit mettre. Elle contribue à l'hon»neur de l'intelligence, en dirigeant la » lecture de manière que le stupide pa» roisse, comme l'homme d'esprit, com» prendre ce qu'il lit. Elle tient en règle

» l'attention de ceux qui écoutent et leur » fixe les bornes du sens. ELLE REMÉDIE » aux obscuriTÉS QUI VIENNENT DU STYLE. » Girard, Vrais principes. Tom. 2. Disc. xv1. p. 435. Beauzée, Gram. générale. Tom. 2. p. 571, 2.

En effet, la ponctuation n'a été ni inventée ni perfectionnée par un médecin, pour aider la respiration d'un poitrinaire; et le dictionnaire de l'Académie fait trèsbien de montrer l'usage du mot ponctuer, et en même temps l'utilité de la chose, par cette phrase: «Quand un livre n'est » pas bien ponctué, on a quelquefois de » la peine à en bien entendre le sens. »

V. 1. Mæcenas,]

Heureux celui, de tout âge, de tout rang et de tout pays, qui lit avec fruit la première note de l'edition à l'usage du Dauphin! Il y apprendra quelque chose de bien preferable aux règles de la triste poactuation. L'éditeur rapporte ce que dit Sénèque: (Epist. 19.), en parlant de Mécène : « Vir

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