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et de vente est non pas seulement association de producteurs, mais encore et surtout association de producteurs et de vendeurs. c'est-àdire véritable organe commercial avec des agents intéressés et des voyageurs. Coopératives d'une formule particulière encore, en ce sens qu'elles ne grouperont pas des producteurs d'une même ville, mais de villes diverses et de villages disséminés. Il n'est pas trop tôt pour étudier la création de tels groupements dont l'action devra se faire sentir dès le lendemain du traité de paix, et ce devrait être l'un des buts des économistes attachés à la préparation de la renaissance d'après-guerre, que de fixer dès à présent les types essentiels que de telles institutions pourront affecter avec le plus d'avantages pour leurs membres.

Du reste, aussi bien pour ces coopératives que pour les artisans, exerçant leur profession dans le cadre limité de leur petite ville, une autre difficulté encore se présentera souvent, se présente déjà, celle de faire face aux frais d'installation ou d'achat de matières premières. L'embryon d'une législation à faire se trouve dans l'aide qu'apporte déjà l'Association pour l'assistance aux mutilés pauvres, laquelle consent des prêts sur l'honneur, du reste très limités, aux invalides pour achat d'outillage ou installation, et qui est, pour cela, subventionnée par l'État. Ce n'est qu'un embryon et il faut une législation. On la trouvera dans l'amélioration et l'élargissement de la législation sur le crédit au petit commerce et à la petite industrie et dans la réorganisation, qui s'imposera après la guerre, de tout notre système bancaire et particulièrement de nos banque de province. Car là, comme ailleurs, l'initiative privée est tout à fait insuffisante l'État, seul, par la loi, par le jeu d'institutions nationales et par le secours de ses services administratifs et de son budget, peut réaliser ce que souhaite l'opinion publique et ce qu'impose la nécessité.

Et maintenant quelle sera notre conclusion? Celle-ci Si le problème des mutilés doit avoir sur la vie économique du pays une répercussion telle que nous venons de la montrer, si sa solution par la réadaptation des invalides au travail doit grandement aider au relè vement de la France, on conçoit qu'il y ait le plus pressant intérêt à pousser à fond l'étude de ce problème, à poursuivre activement la réalisation de cette solution.

Le gouvernement et le Parlement, nous l'avons dit, ont fait effort dans le sens d'une organisation générale qu'ils n'ont pu encore mettre en fait accompli. Les initiatives privées n'ont que peu réussi à obtenir

d'autres résultats que des succès fragmentaires dont il faut se louer, mais qui ne compensent pas toujours des échecs dont l'importance n'est pas contestable. Quand on songe au gaspillage d'argent qu'a fait une grande œuvre privée pour aboutir à un néant d'action désolant, quand on songe d'autre part aux prétentions exorbitantes formulées par les amis ds cette œuvre ou d'autres semblables à la tribune du Parlement, on s'explique trop facilement la stagnation que nous déplorons si sincèrement.

Contre cette stagnation nous avons tenté de réagir, lorsqu'en mai dernier, s'est réunie à Paris la Conférence interalliée des mutilés. Le Grand-Palais a abrité des travaux intéressants. Des hommes et des femmes de la plus grande valeur et d'une admirable bonne volonté sont venus de tous les pays amis confronter les données de leur expérience et de leurs idées. Hélas! là encore il y avait un tel manque de préparation d'organisation, peut-être d'exacte compréhension de l'importance du problème qu'on a eu l'impression d'une vaste discorde de médecins et de techniciens et qu'il n'en est sorti qu'une longue liste de vœux, la plupart d'intérêt tout à fait secondaire ou purement médical, souvent contradictoires. Un seul, s'il est réalisé peut donner ce résultat pratique appréciable d'établir un organe de coordination entre les diverses nations de l'entente pour leur documentation et leur propagande. Pourtant les sections avaient travaillé, les rapporteurs avaient osé, quelques uns avaient vu clair...

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C'est qu'il est moins difficile de savoir que de s'entendre, d'exposer des idées que de les réaliser. Une volonté d'action peut seule permettre la solution rationnelle et rapide des difficultés d'après la guerre. L'heure est venue qui passera bientôt si l'on n'y prend garde de mettre cette volonté en œuvre pour l'organisation de la rééducation professionnelle. Toutes les initiatives doivent comprendre la nécessité de leur union sous la direction des pouvoirs publics — qui doivent eux-même saisir l'importance et le sens de cette direction. Il faut que dans le plus bref délai toutes les mesures soient prises pour transformer. l'œuvre dispersée et anémiée en une œuvre utile, méthodique et féconde.

A.-L. BITTARD.

LA BANQUE NÉERLANDAISE

EN 1916-1917

A titre purement documentaire, sine ira el studio, il nous paraît utile de résumer le rapport du docteur Vissering, gouverneur de la Banque néerlandaise, sur l'exercice 1916-1917. Ce rapport est intéressant parce qu'il émane d'un homme du métier, habitué à envisager les problèmes monétaires dans leur ensemble, et parce qu'après tout, la Hollande, malgré la diminution de son importance financière, demeure un pays de capitalistes, ayant fait des placements à travers le monde, en Amérique, en Asie et parce que, grâce à la possession de ses colonies, la Hollande, en temps ordinaire, est un gros entrepôt de tabac, de café, de sucre, en même temps qu'un magasin par lequel passent les marchandises descendant le Rhin jusqu'en Suisse.

Aujourd'hui la nécessité d'enlever aux ennemis limitrophes des Pays-Bas les ressources du ravitaillement a considérablement réduit les transactions avec l'étranger. Mais la guerre a cependant eu des répercussions notables sur la vie économique, répercussions qui se traduisent dans les bilans de la Banque néerlandaise.

M. Vissering ne dissimule pas son découragement et son pessimisme. Le nombre des États neutres se réduit de plus en plus, les difficultés s'accentuent pour ceux qui n'entrent pas dans la guerre, notamment pour la Hollande dont l'économie nationale reposait sur la liberté du commerce international.

Trois problèmes principaux ont surgi, la solution en devient de moins en moins aisée : 1° le problème de l'armement; 2° celui du ravitaillement en denrées alimentaires et en matières premières industrielles; 3° celui du marché financier, c'est-à-dire des relations financières avec les pays étrangers, l'extension du crédit et le problème de l'or.

Quant au premier problème, la Hollande a dû renforcer sa propre défense, elle s'est abstenue scrupuleusement de fournir du matériel de guerre aux belligérants.

Elle a vendu des marchandises à l'étranger, notamment aux belligérants, sous forme d'aliments, dans un intérêt d'humanité, dit M. Vissering, mais avec la politique de s'affamer réciproquement que poursuivent les belligérants, la tâche est ingrate.

D'autre part, ces ventes sont dues non seulement au désir de gagner de l'argent, mais encore à la nécessité de trouver un débouché pour l'excédent de la production agricole nationale, de se procurer, en échange des engrais, des denrées pour l'alimentation du bétail. La situation a été certainement pénible, il a fallu parfois subir des privations de combustibles, de libre trafic maritime et télégraphique, lorsque les belligérants se sont considérés comme lésés.

Cet ensemble de transactions a pour conséquence des arrangements d'ordre financier. La Hollande a importé de moins en moins, alors que ses exportations augmentaient; le change devenait de plus en plus défavorable à ses clients étrangers, qui demandaient à payer leurs achats non pas en or ni en marchandises, mais en billets hollandais. Il fallut donc faire des combinaisons pour permettre de régler les achats en papier de crédit, qui viendrait se faire escompter à la Banque néerlandaise ou servir de contre-valeurs et de nantissement à des avances.

M. Vissering, insiste sur le fait que la nécessité a amené l'institu. tion qu'il dirige à coopérer à des arrangements auxquels elle se serait refusée avant la guerre. Il fait ressortir très hautement que la Banque nerlandaise n'a jamais participé aux opérations faites par toutes sortes d'institutions et d'individus avec les belligérants, dans un dessein de lucre. Elle s'est opposée aux arrangements séparés, par crainte d'être débordée un jour par ces accumulations de crédit. Elle a redouté les complications de l'avenir, qui lui auraient imposé des obligations trop lourdes. Elle a déclaré à diverses reprises que, plus tard, elle ne viendrait pas en aide à ceux qui auraient fait avec l'étranger, uniquement des opérations financières, sans la consulter. C'est la théorie restrictive qu'opposent les institutions centrales de crédit aux effets financiers, préférant les effets de commerce ayant une origine légitime. La distinction n'est pas toujours commode.

M. Vissering réserve le droit absolu de rechercher la cause de la création de l'effet à escompter; il ne craint pas de prévenir qu'il y aura des refus à prévoir de sa part. Si grande que puisse sembler l'abondace de capital en ce moment, le retour de la paix amènera de grandes modifications, des demandes énormes de crédit, des possibilités de grosse crise contre laquelle il faut se prémunir.

Parmi les affaires de l'année, il faut citer le renouvellement des bons du Trésor anglais à un an, qui avaient été donnés comme couverture à des crédits hollandais ou qui avaient servi à liquider des

achats. Le taux du change a été fixé à 12 florins par livre sterling, comme limite extrême, au moment du remboursement. Un nouvel arrangement a été fait portant la limite à 12 florins 15. A ce cours maximum, la trésorerie anglaise s'est engagée à mettre la somme correspondante à Londres, à la disposition de la Banque néerlandaise, qui s'est assuré ainsi le taux correspondant à l'ancienne parité pour le rapatriement des capitaux hollandais représentés par ces effets du Trésor britannique.

Les deux tableaux donnés plus loin indiquent : 1° les mouvements des comptes principaux en mille florins; 2° les oscillations du change. Le portefeuille s'est bien dégonflé en comparaison du maximum atteint en automne 1914: il contient surtout des effels du Trésor. L'encaisse métallique n'a cessé de grossir. Il y aurait eu davantage de progression sans les arrangements faits pour ouvrir des crédits à l'étranger rapportant des intérêts aux capitaux hollandais. La Banque néerlandaise a continué à acheter en Hollande des dollars qu'elle a encaissés et fait déposer en or à New-York. L'émission des billets ne cesse de grandir en partie par suite de la thésaurisation des particuliers.

Beaucoup de capitalistes gardent des billets de mille florins par devers eux. Actuellement, il y a 28 p. 100 de la circulation fiduciaire en Hollande (205 225 000) en billets de 1 000 florins contre 15 p. 100 en 1913, 21 p. 100 en billets de 100 florins, 10,69 p. 100 en billets de 25 florins, 10,65 en billets de 10 florins.

Le gouverneur de la Banque néerlandaise ne croit pas qu'il y ait eu en Hollande ni dépréciation de l'or, ni inflation monétaire. Il explique la hausse des prix par des raisons inhérentes aux marchandises mêmes par suite des bouleversements résultant de la guerre. L'accumulation d'or en Hollande lui semble un phénomène transitoire, et il n'y a pas eu lieu d'imiter la politique poursuivie en Scandinavie à l'égard du métal jaune. D'autre part, vu l'afflux de monnaies d'or étrangères, on en a baissé le prix d'achat de 1 650 florins à 1 648 florins, alors qu'il en a été payé 1 648 pour l'or en lingot. L'or n'a été accepté par la Banque que si la transaction donnant lieu à l'apport du métal jaune lui a semblé être dans l'intérêt du pays.

Le florin hollandais a fait prime pour les belligérants. Il a été en perte en Espagne et en Scandinavie. Ces deux pays ont refusé de faire des crédits liquidables après la disparition de la perte au change hollandais. Leur obstination, dit M. Vissering, aura une influence déplorable sur les transactions commerciales à l'avenir.

Le deuxième tableau donne les fluctuations du change au début, à la fin de l'exercice, le plus haut et le plus bas cours des douze mois.

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