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sons ennemies et neutres. En Russie, c'est une commission française qui opère.

Une des principales difficultés a été la hausse continue des prix depuis le début de l'année 1917, sous le bruit d'un déficit mondial de blé. La hausse ne serait pas due, dit le rapport, aux méthodes employées par la Commission des blés, malgré l'importance des achats. Sauf aux États-Unis et au Canada, on a acheté dans les autres marchés par l'intermédiaire des gouvernements à des prix limités. Il y a eu amélioration pour les Etats-Unis depuis le Food Control Act, on a pu y acheter à 2 dollars 20, et au Canada à 2 dollars 21 le bushel.

Le plus gros achat fut fait en Australie directement au gouvernement: 14 millions quarters de froment pour 26 millions de liv. st.'. Peu de temps après la conclusion du contrat, la crise des transports devint aiguë; la plus grande partie du froment est emmagasinée aux antipodes. Le gouvernement australien a garanti la qualité marchande du blé exporté jusqu'au 31 décembre 1917. Une entente a été faite avec lui pour emmagasiner la farine dans laquelle on transforme le blé acheté, parce que la farine se conserve plus longtemps, prend moins de place à bord et constitue une denrée prête à être consommée à l'arrivée. On redoute cependant la perte d'une grande quantité de farine si l'on ne peut l'expédier promptement. A défaut, pour en sauver le plus possible, la sous-commission d'enquête suggère de faire fabriquer un article de conservation plus durable.

Ce n'est pas une brillante opération que celle-là ni d'autres que laisse soupçonner le rapport sur des blés achetés et emmagasinés en Angleterre, il y aura des pertes qui dépasseront 2 millions de liv. st. Cependant on aurait pu, à la fin de juillet, réaliser les vieux stocks avec 3 millions de livres de bénéfice ou en tout cas procurer du blé sans perte, déduction faite de celle subie sur la réserve des blés. Le contrôleur de l'alimentation a bouleversé tous ces calculs, en décidant que le blé doit être vendu à un prix qui permette d'acheter le pain de 4 livres anglaises pour 9 pence: c'est un sacrifice de 40 millions de liv. st. par an.

Ainsi on a fait de mauvaises affaires en achetant de grandes quantités de froment en Australie, pour lesquelles il n'y a pas eu le tonnage disponible, en augmentant la réserve des blés, en vendant le pain au-dessous du prix de revient 2.

1. En 1916, M. Hughes annonça qu'en même temps qu'il effectuait cette vente, il achetait une flotte de steamers pour l'Australie. En tout cas, cette flotte n'a pas servi au transport des blés.

2. Ce sont là des faits sérieux. Avec du bon sens et une connaissance pratique des affaires, on aurait pu éviter ces mécomptes. Il faut fournir le pain à la nation; c'est entendu, mais pourquoi acheter tant de blé

Cet exemple des achats de blé indique bien l'insuffisance du système de l'État commerçant !

Le rapport indique les chiffres dépensés pour la campagne de publi cité gouvernementale pour stimuler les enrôlements. La conduite de cette campagne fut confiée à un comité parlementaire présidé par M. Henderson. 54041 liv. st. furent payées à la Presse pour des annonces dont le Daily Mail reçut 2 680 liv. st., le Daily News 1434, le Daily Chronicle 1082, le Times 1050, le Daily Telegraph 1007, le Morning Post 737, le Yorkshire Post 655, le Glasgow Herald 636, le Seotsman 536, le Manchester Guardian 410. Deux mille journaux en tout ont reçu des annonces. En outre, 33838 liv. st. ont été dépensés en affiches, prospectus. Un comité a été formé pour organiser des réunions publiques. Il a été payé 102 liv. st. aux agents des deux partis en Ecosse, 4332 en Angleterre. Pourquoi cette grosse différence. La sous-commission conclut que les résultats obtenus ne répondent pas aux dépenses de publicité du National Service Department. Celuici, qui a un effectif de 401 employés, occupant trop de place, a coûté en huit mois 223 000 liv. st. Il n'a tenu aucune comptabilité de la papeterie et des imprimés. Il a enrôié 351 000 hommes, 42000 femmes. On a placé 20 000 hommes, 14000 femmes. L'armée a prêté 68 000 soldats à l'agriculture. Ils ont été rappelés. On a mis en culture

20000 acres.

Il semble que la Trésorerie n'a exercé aucun contrôle sérieux sur les dépenses du National Service Department. N'en est-il pas de même pour le reste de l'administration? It is thus all round, nous répond M. Wilson.

A. RAFFALOVICH.

d'avance, sans être en mesure de le mettre en magasin dans de bonnes conditions, à l'abri des rats, des souris, de la vermine. Pourquoi le Food Controler a-t-il fixé le prix de vente du blé à 9 pence, s'il savait tout cela ? le savait-il ? comptait-il sur l'arrivée du blé d'Australie.

REVUE

ᎠᏴ

L'ACADÉMIE DES SCIENCES

MORALES ET POLITIQUES

(Du 15 août au 15 novembre 1917.)

SOMMAIRE: Les lois de maximum sous la Révolution et la taxation des salaires. L'économie politique et les économistes. - Discussion sur la Réforme administrative. - Travaux divers. — La population dans les campagnes de l'arrondissement de Fougères. Communications des savants étrangers. Décès.

I

M. Marion, correspondant de l'Académie des sciences morales et politiques, a fait devant cette dernière une lecture sur les Lois de maximum sous la Révolution et la taxation des salaires.

Des quatre lois successives de maximum par lesquelles la Convention tenta vainement d'arrêter, au moyen de la taxation, la hausse des denrées qui, se raréfiant, devenaient forcément plus chères, et la baisse d'un papier-monnaie qui, se multipliant, devenait forcément plus déprécié, il n'en est pas une qui ne donne prise soit dans l'ensemble, dans les détails à de graves critiques. I suffira de rappeler la contradiction initiale qui aurait suffi, à elle seule, en l'absence de toute autre raison, pour faire échouer cette tentative. Vouloir immobiliser les prix alors que des émissions fréquentes, considérables, connues du pub'ic (au moins pendant longtemps) accroissaient la quantité d'assignats en circulation était vouloir l'impossible. La muitiplication du papier, qui forçait le gouvernement révolutionnaire à taxer les denrées pour donner un semblant de satisfaction aux Popu'ations torturées par la cherté croissante de la vie, était précisément ce qui rendait im ossible, a priori, le succès de cette taxation. Il aurait fallu d'abord pour être logique, cesser les émissions nouvelles, ou bien admettre une élévation progressive des prix proportionnelle à

l'accroissement du papier; précaution indispensable, et qui d'ailleurs n'aurait pas été suffisante.

Mais si le législateur de 1793 a commis une faute considérable en ne voyant pas ou en ne voulant pas s'avouer cette contradiction, il faut reconnaître, en revanche, qu'il n'a pas méconnu l'impossibilité de taxer une chose sans taxer aussi toutes les autres et, particulièrement, l'impossibilité de taxer les produits sans taxer aussi les salaires. Dans un but de popularité, il voulut que le prix des marchandises fût celui de 1790 augmenté d'un tiers et le taux des salaires celui de 1790 augmenté de moitié : disposition évidemment critiquable mais qui prouve au moins de sa part la perception très nette de cette vérité qu'il importe d'empêcher une hausse indéfinie des salaires quand on veut empêcher une hausse indéfinie des denrées. La maind'œuvre fut donc taxée.

Mais l'histoire de ce maximum particulier se compose surtout, pour ne pas dire uniquement, des violations continuelles et impunies d'une loi évidemment inexécutable. Dans ses propres usines de guerre, le gouvernement était obligé, tout le premier, de ne pas tenir trop rigoureusement la main à l'observation du maximum et il devait subir dans une certaine mesure les exigences de la main d'œuvre qu'il employait. Certes, le gouvernement n'était pas de ceux en mesure de craindre les difficultés. Néanmoins, son autorité n'allait pas jusqu'à pouvoir s'affranchir d'une loi plus puissante que toutes les siennes, à savoir celle de l'offre et de la demande. Lorsqu'un arrêté fixait le prix du travail à la journée, uniformément dans tous les ateliers, entre un minimum de 3 livres et un maximum de 5, il violait sensiblement la loi, car les salaires de 2 francs en 1790 étaient une rareté dont on ne pouvait trouver l'exemple qu'à Paris et pour certains métiers exigeant une particulière habileté quant à des salaires de 3, 35, c'était chose absolument inconnue. De même, dans les manufactures de papier-assignats, aussi importantes peut être pour la conduite de la guerre que celles d'armes et de munitions: les ouvriers y gagnaient 32 sous en 1790, ils gagnèrent en nivôse an II, non pas 48 sous, mais 31,15 sous, 27 sous de plus que ce que comporterait le maximum.

La main-d'œuvre agricole, tout comme la main-d'œuvre urbaine, se déroba quand on voulut lui appliquer les prix légaux. En l'an II, la Convention édicta en principe la réquisition des ouvriers agricoles pour la moisson et la mesure fut étendue à tous les genres de travaux; des instructions formelles furent expédiées en vue d'une stricte observation de ces prescriptions; les autorités locales se bornèrent à un simple accusé de réception et à faire des protestations de zèle, mais elles se gardèrent bien de faire connaître les résultats; c'est qu'en

effet, il y eut des résistances sérieuses ou des abstentions concertées dont il était impossible de venir à bout.

Si la Terreur elle-même se montra impuissante à contraindre les ouvriers à renoncer pour le plus grand profit du système du maximum, aux prix plus avantageux qu'ils pouvaient obtenir, on devine facilement ce que devint la taxation des salaires lorsque la Terreur ne fut plus qu'un souvenir, et lorsque la dépréciation de l'assignat, devenue énorme, enfla dans des proportions incroyables le prix de toutes choses sauf une cependant, la plus essentielle de toutes, la seule qui ait été pratiquement atteinte par les lois de taxation, la seule pour laquelle fussent à peu près observés, en fait, des tarifs qui, pour tout le reste n'étaient guère qu'un objet de dérision: à savoir, les grains en général, et le blé en particulier. Triste privilège, et combien funeste à l'agriculture et à l'alimentation publique! On devine facilement dans quelle situation lamentable se débattait le cultivateur, obligé de payer à des prix sans cesse croissants ses bestiaux, ses instruments aratoires, sa main-d'œuvre et cependant empêché de tirer de ses récoltes des prix suffisants pour ne pas travailler à perte. On en arriva à poser ce dilemme : ou rabaisser le prix des denrées, des manœuvres et des journées de travail au prix du blé; ou élever le prix du blé au prix actuel des autres denrées et de la main-d'œuvre. La Convention hésita l'effrayante perspective d'une augmentation démesurée du blé et du pain le jour où la taxe cesserait de jouer, faisait reculer bien des courages; mais il n'y avait plus qu'à choisir entre ce danger et le danger plus redoutable encore d'une rapide disparition de la production nationale. Elle essaya d'abord d'un timide palliatif : la loi du 19 brumaire an IIl fixa le prix de chaque espèce de grains et de fourrages, dans chaque district, aux prix de 1790 aug mentés non plus d'un tiers, mais des deux tiers. Dans un moment où l'assignat perdait 76 p. 100 de sa valeur nominale, en attendant plus, et où les prix de toutes choses continuaient leur marche ascendante, cette concession était purement illusoire. Force fut bientôt de regarder les choses plus en face la suppression de toute taxe s'imposait; la Convention s'y décida le 4 nivôse. L'impossibilité démontrée d'empècher la hausse de la main-d'œuvre fut un des arguments principaux des orateurs qui combattirent le maximum. L'erreur a été signalée de bonne heure dès nivôse an II, le commissaire Grivel, homme fort intelligent, avait écrit ces lignes bien dignes d'attention: «< Favoriser le cultivateur et le marchand au préjudice du consommateur serait un mal; mais c'en est un plus grand, j'ose le dire, de donner la préférence à l'intérêt du consommateur sur celui du nourricier, car, dans ce cas, l'injustice et l'erreur ont de terribles conséquences. Si le cultivateur ne trouve pas dans ses travaux assidus un bénéfice honnête,

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