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faires; il s'en vantait; mais le génie de la liberté a vaincu pour nous. Celui qui parmi nous accepta toujours avec le plus de joie le pouvoir fut Hérault, le complice de Fabre et de l'étranger. Tout se lie après que Fabre eut tout fait pour nous donner une juridiction dans le dédale de laquelle il espérait nous perdre, alors il fit attaquer les opérations du gouvernement.

» Alors Hérault, qui s'était placé à la tête des affaires diplomatiques, mit tout en usage pour éventer les projets du gouvernement: par lui les délibérations les plus secrètes du comité sur les affaires étrangères étaient communiquées aux gouvernemens ennemis. Il fit faire plusieurs voyages à Dubuisson en Suisse pour y conspirer sous le cachet même de la République. Nous nous rappelons qu'Hérault fut avec dégoût le témoin muet des travaux de ceux qui tracèrent le plan de la Constitution, dont il se fit adroitement le rapporteur éhonté.

>> Nous avons intercepté des lettres de Las-Casas, ambassadeur d'Espagne à Vienne, dans lesquelles il rapporte les délibérations diplomatiques du comité au temps d'Hérault.

» C'était dans ce même temps qu'environné de piéges et de la responsabilité des succès de quatorze armées, une nuée d'ennemis attaqua le gouvernement, c'est à dire vous attaqua vous-mêmes.

» Le moment était favorable : l'Alsace était envahie; Toulon était aux mains des Espagnols et des Anglais; Perpignan menacé; nos armées malheureuses dans le Nord, dans le MontBlanc, dans la Vendée, partout enfin. Alors le parti Hébert demandait l'établissement de la Constitution, afin que dans ce chaos de dangers et d'adversités, dans cette agonie factice de la liberté, le passage du gouvernement révolutionnaire à un régime plus faible que ses ennemis fût le passage de la vie au tombeau. L'établissement de la Constitution fut demandé par Danton, l'ami de Fabre. En même temps Philippeaux, ou plutôt Fabre, dont le style, l'hypocrisie, les insinuations, sont reconnus facilement dans les écrits du premier, en même temps Philippeaux attaqua le gouvernement comme associé à la trahison.

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de l'appel au peuple, et contre Marat. Philippeaux mit au jour dans ces derniers temps divers écrits qui sont évidemment de différentes plumes: le but de ces écrits était d'en induire la complicité du gouvernement avec ceux qui trahissaient la patrie. Philippeaux, auteur quelques jours auparavant d'un catéchisme ridicule, était devenu tout à coup un homme d'état. Philippeaux est l'âme du club du Mans, où la liberté, où la représentation nationale n'a pas un ami, où l'on a demandé votre renouvellement, où l'on a dit que vous étiez usés dans le temps même que le disait Hébert.

» Vous avez même appris ce matin qu'une révolte avait éclaté au Mans contre Garnier, représentant du peuple. Cette révolte a été fomentée par ceux là mêmes qui rédigèrent une adresse en faveur de Philippeaux : ils sont arrêtés ; le tribunal révolutionnaire va instruire cette affaire. Revenons à notre sujet.

>> On peut se souvenir que Fabre en ce temps-là ne quittait point Camille ni Philippeaux. Fabre, en même temps qu'il dirigeait ces deux personnages, était partout: il était sans cesse au comité de sûreté générale; il était dans les groupes, à la police, à la commune, aux Jacobins, aux Cordeliers; il se multipliait, et dictait divers écrits: il se glissait auprès des patriotes, et il est prouvé que cet homme, qui s'était efforcé d'accroître l'autorité du comité, la sapait dans chacun de ses membres. Au milieu des dangers qui environnaient la patrie on délibérait les soirs sur tout ce que chacun de nous avait remarqué de contraire au bien public dans la journée. Il se trouva que Fabre disait à chacun des membres du comité du bien d'eux-mêmes, et du mal de chaque autre. Complice de Chabot, il l'accusa lorsqu'il le sut accusé, comme Chabot accusa ses complices. Fabre s'attachait surtout à prouver que tous les complots avaient pour but de perdre Danton. La réaction de ces intrigues aurait été de renverser le gouvernement et la représentation, de ruiner les partis opposés ; et que serait-il resté ? Fabre et sa faction!

>> Maintenant il faut rapprocher d'autres faits des précédens.

» L'été dernier Hérault, cherchant des partisans ou tâtant

les esprits, dit que Luilter, procureur général du département de Paris, avait confié qu'il existait un parti en faveur du jeune Capet, et que si le gouvernement pouvait perdre faveur, et le parti arriver au degré d'influence nécessaire, ce serait Danton qui montrerait au peuple cet enfant.

» Dans ce temps Danton dîna souvent rue Grange-Batelière avec des Anglais : il dînait avec Gusman, espagnol, trois fois par semaine, avec l'infâme Saint-Amaranthe, le fils de Sartine, et Lacroix. C'est là que se sont faits quelques-uns des repas à cent écus par tête.

» Il est clair que le parti qui voulait établir prématurément la Constitution, celui qui attaquait le gouvernement, celui qui attaquait la Convention, celui qui corrompait, celui qui voulait un comité de clémence, avaient tous pour objet d'amener le dégoût du régime présent, et il est évident que la royauté était celui qu'on y voulait substituer.

>>

Qu'on examine maintenant la conduite de tous ceux dont j'ai parlé, leurs liaisons, leurs excuses toujours prêtes en faveur des hommes tarés; on reconnaît à des signes certains le parti opposé à la révolution, et qui dissimula toujours. Que ceux dont j'ai parlé nous disent d'où vient leur fortune; que Lacroix dise pourquoi l'été dernier il faisait acheter de l'or par un banquier.

>> Ceux qui depuis quatre ans ont conspiré sous le voile du patriotisme, aujourd'hui que la justice les menace, répètent ce mot de Vergniaud : la révolution est comme Saturne; elle dévorera tous ses enfans. Hébert répétait ce mot pendant son procès ; il est répété par tous ceux qui tremblent et qui se voient démasqués. Non, la révolution ne dévorera pas ses enfans, mais ses ennemis, de quelque masque impénétrable qu'ils se soient couverts!

» Les conjurés qui ont péri étaient-ils les enfans de la liberté parce qu'ils leur ressemblèrent un moment? La révolution dévorera jusqu'au dernier ami de la tyrannie; il ne périra pas un véritable patriote par la justice; elle n'immolera que les factions criminelles.

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Citoyens, elles méditent chaque jour votre perte; tous les fripons se rallient à elles. Elles s'attendaient depuis quel

ques jours à être démasquées; Danton, Lacroix disaient : préparons-nous à nous défendre! Ainsi Hébert, déjà poursuivi par l'image de son supplice, criait il y a trois décades : on veut me perdre; défendez-moi!

» Un innocent parle-t-il de se défendre? A-t-il des pressentimens de terreur avant qu'on ait parlé de lui ? Les comités ont gardé prudemment le silence, et l'opinion et le peuple accusaient avant moi ceux que j'accuse. Ils s'accusaient, ils se désignaient eux-mêmes, car nous n'avions point parlé d'eux : ils se préparaient à demander si nous voulions détruire la représentation, parce que nous les accusons ; et ceux-là nous fontils un crime d'avoir accusé Brissot, Chabot et leurs complices? Veut-on les réhabiliter?

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Soyez donc inflexibles : c'est l'indulgence qui est féroce puisqu'elle menace la patrie.

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Quand les restes de la faction d'Orléans, dévoués aujourd'hui à tous les attentats contre la patrie, n'existeront plus vous n'aurez plus d'exemple à donner; vous serez paisibles; l'intrigue n'abordera plus cette enceinte sacrée ; vous vous livrerez à la législation et au gouvernement; vous sonderez ses profondeurs, et vous déroberez le feu du ciel pour animer la République, tiède encore, et enflammer l'amour de la patrie et de la justice: alors il ne restera plus que des patriotes; alors sera détruite l'illusion des intrigues qui depuis cinq ans, ayant pris le masque de la révolution, voudraient aujourd'hui leur faire partager leur opprobre en faisant dire que les patriotes seront tous déshonorés les uns après les autres. Ainsi donc, parce que des lâches et des ennemis de l'humanité se sont fait prophètes, la Divinité en aurait perdu de sa gloire ! parce que des hypocrites auraient usurpé la réputation du patriotisme, l'éclat du patriotisme serait obscurci! Ceux que je dénonce n'ont jamais été patriotes, mais aristocrates adroits et plus dissimulés que ceux de Coblentz.

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» Toutes les réputations qui se sont écroulées étaient des réputations usurpées par l'aristocratie ou par des factions criminelles. Ceux qui nous reprochent notre sévérité aimeraientils mieux que nous fussions injustes? Peu importe que le temps ait conduit des vanités diverses à l'échafaud, au cimetière, au

néant, pourvu que la liberté reste! On apprendra à devenir modeste; on s'élancera vers la solide gloire et le solide bien, qui sont la probité obscure. Le peuple français ne perdra jamais sa réputation : la trace de la liberté et du génie ne peut être effacée dans l'univers; opprimé dans sa vie, il opprime après lui les préjugés et les tyrans; le monde est vide depuis les Romains, et leur mémoire le remplit, et prophétise encore la liberté.

» Pour vous,

après avoir aboli les factions, donnez à cette République de douces mœurs; rétablissez dans l'état civil l'estime et le respect individuel. Français, soyez heureux et libres; aimez-vous, haïssez tous les ennemis de la République, mais soyez en paix avec vous-mêmes. La liberté vous rappelle à la nature, et l'on voulait vous la faire abandonner! N'avez-vous point d'épouses à chérir, d'enfans à élever ? Respectez-vous mutuellement. Et vous, représentans du peuple, chargez-vous du gouvernement suprême, et que tout le monde jouisse de la liberté au lieu de gouverner. La destinée de vos prédécesseurs vous avertit de terminer votre ouvrage vousmêmes, d'être sages, et de propager la justice sans courir à la renommée; semblables à l'Etre suprême, qui met le monde en harmonie sans se montrer: le bien public est tout; mais pour la renommée elle n'est rien !

» Barnave fut porté en triomphe sous vos fenêtres; où est-il ?

» Ceux que j'ai dénoncés n'ont jamais connus de patrie; ils se sont enrichis par des forfaits, et ce n'est point leur faute si vous existez ; il n'est point de crimes qu'ils n'aient protégés, point de traîtres qu'ils n'aient excusés; avares, égoïstes, apologistes des vices, rhéteurs, et non pas amis de la liberté, la République est incompatible avec eux; ils ont besoin de jouissances qui s'acquièrent aux dépens de l'égalité; ils sont insatiables d'influence. Les rois comptent sur eux pour vous détruire à quelles protestations pourriez-vous croire de la part de ceux qui, pressant la main sacrilège de Dumourier, lui jurèrent une amitié éternelle? Serment qui fut gardé ; la Belgique et l'armée, vous et l'Europe en êtes témoins.

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Il y a donc eu une conjuration tramée depuis plusieurs

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