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Des chofes ici-bas la Fortune décide
Selon fes caprices divers:

Tout l'effort de notre prudence

Madame Deshoulies res.

Ne peut nous dérober au moindre de fes coups.
Paiffez, moutons, paiffez, fans regle et fans fcience.
Malgré la trompeuse apparence

Vous êtes plus heureux et plus fages que nous.

LE RUISSE À U.

IDYLLE.

Ruiffeau, nous paraiffons avoir le même fort:
D'un cours précipité nous allons l'un et l'autre,
Vous à la mer, nous à la mort.

Mais hélas! que d'ailleurs je vois peu de rapport
Entre votre courfe et la nôtre !

Vous vous abandonnez fans remords, fans terreur
A votre pente naturelle;

Point de loi parmi vous ne la rend criminelle;
La vieilleffe chez vous n'a rien qui fasse horreur.
Près de la fin de votre course,
Vous êtes plus fort et plus beau,
Que vous n'étes à votre fource.

Vous retrouvez toujours quelque agrément nout.

veau..

Si de ces paifibles bocages

La fraicheur de vos eaux augmente les appas,
Votre bienfait ne fe perd pas:

Par de délicieux ombrages
Ils embelliffent vos rivages.

Sur un fable brillant, entre des prés fleuris

Coule votre onde toujours pure;

Mille et mille poiffons, dans votre fein nourris,

Beisp. S. 1. B.

BH

Ne

• Madame

Ne vous attirent point de chagrins, de mepris. Deshoulie Avec tant de bonheur, d'où vient votre murmure?

res.

..

Hélas! votre fort eft fi doux!

Taifez-vous, ruiffeau c'eft à nous
A nous plaindre de la nature.

De tant de paffions que nourrit notre coeur,
Apprenez qu'il n'en eft pas une

Qui ne traîne après foi le trouble, la douleur,

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Le repentir ou l'infortune.

Elles dechirent nuit et jour,

Le coeur dont elles font maîtrefles;
Mais de ces fatales foibleffes,

La plus à craindre c'eft l'amour;

Ses douceurs même font cruelles;

Elles font cependant l'objet de tous les voeux;
Tous les autres plaifirs ne touchent point fans elles.
Mais de plus forts liens le tems ufe les noeuds;
Et le coeur le plus amoureux

Devient tranquille, ou paffe à des amours nouvel-
les.

Ruiffeau, que vous êtes heureux!

Il n'eft point parmi vous de ruiffeaux infidelles.
Lorsque les ordres abfolus

De l'être indépendant qui gouverne le monde,
Font qu'un autre ruiffeau fe mêle avec votre onde;
Quand vous êtes unis, vous ne vous quittez plus.
A ce que vous voulez jamais il ne l'oppofe;

Dans votre fein il cherche à f'abimer;
Vous et lui, jusques à la mer,

Vous n'êtes qu'une même chofe.
De toute forte d'unions

Que notre vie eft éloignée!

De trahifons, d'horreurs et de diffenfions
Elle est toujours accompagnée.

Qu'avez vous mérité, ruiffeau tranquille et doux,
Pour être mieux traité que nous?
Qu'on ne me vante point ces biens imaginaires
Ces prérogatives, ces droits,

Qu'inventa notre orgueil pour marquer nos mifères;
C'eft lui feul qui nous dit que, par un jufte choix,

Le

Le Ciel mit, en formant les hommes,
Les autres êtres fous leurs loix.
A ne nous point flater, nous fommes
Leurs tyrans, plutôt que leurs ròis.
Pourquoi vous mettre à la torture?
Pourquoi vous renfermer dans cent canaux divers?
Et pourquoi renverser l'ordre de la Nature,

Et vous forçant de jaillir dans les airs?
Si tout doit obéir à nos ordres fuprêmes;
Si tout eft fait pour nous, f'il ne faut que vouloir,
Que n'employons-nous mieux ce fouverain pou
voir?

Que ne regnons-nous fur nous-même ?
Mais hélas! de fes fens efclave malheureux,
L'homme ofe fe dire le maître

Des animaux qui font peut-être

Plus libres qu'il ne l'eft, plus doux, plus genereux,
Et dont la foibleffe a fait naître

Cet empire infolent qu'il ufurpe fur eux.

Mais, que fais-je? où va me conduire
La pitié des rigueurs dont contre eux noux ufons?
Ai-je quelqu'efpoir de détruire

Des erreurs où nous nous plaifons?
Non. Pour l'orgueil et pour les injuftices
Le coeur humain femble être fait.
Tandis qu'on fe pardonne aifément tous le vices,
On n'en peut fouffrir le portrait.
Hélas! on n'a plus rien à craindre;
Les vices n'ont plus de cenfeurs;

Le monde n'eft rempli que de lâches flateurs.
Sçavoir vivre, c'eft fçavoir feindre.
Ruiffeau, ce n'eft plus que chez vous
Qu'on trouve encor de la franchife:
voit la laideur ou la beauté qu'en nous
La bizarre nature a mife.

On

Aucun défaut ne f'y déguise;

Aux Rois comme aux Bergers vous le reprochez

tous :

Auffi, ne confulte-t-on guère

De vos tranquilles eaux le fidele crystal.

B b 2

On

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Madame On évite de même un ami trop fincère.
Deshoulies Ce deplorable goût eft le goût général.

res.

Les leçons font rougir, perfonne ne le fouffre;
Le fourbe veut paroître homme de probité;
Enfin dans cet horrible gouffre

De mifere et de vanité,

Je me perds; et plus j'envisage

La foibleffe de l'homme et fa malignité,
Et moins de la Divinité

En lui je reconnois l'image,

Courez, ruiffeau, courez; fuyez-nous, reportez
Vos ondes dans le fein des mers dont vous fortez,
Tandis que pour remplir la dure destinée
Ou nous fommes affujétis,

Nous irons reporter la vie infortunée,

Que le hazard nous a donnée,

Dans le fein du néant, d'où nous fommes fortis.

Fontenelle.

(Bernard le Bouvier de Fontenelle, geboren zu Rouen, 1657, und geftorben in seinem hunderten Lebensjahre, 1757, auch als Philosoph und wißiger Schriftsteller rühmlich bekannt, verdient als Dichter keinen sehr vorzüglichen Rang. Vielleicht konnte er unter allen poetischen Gatz tungen, bei der üppigen Ergiebigkeit seines Wizes, keine unglücklicher wählen, als die Schäferpoesie, in der gerade die Begierde nach With und Schimmer so zweckwidrig und nachtheilig wird. Die Sprache seiner Schäfer ist die verfeis, verte Hofsprache, und folglich äußerst unnatürlich.)

ISMEN E..

Eclogue, à Mademoiselle. ..

Vous qui par vos treize ans à peine encor fournis,

Par un éclat naiffant de charmes infinis,

Par la fimplicité compagne de votre âge,
D'un ruftique Hautbois vous attirez l'hommage;
Vous, dont les yeux deja cauferoient dans nos
champs

Mille innocens combats et de Vers et de Chants,
Pour des Mufes fans art convenable Heroïne,
Ecoutez ce qu'ici la mienne vous destine.

Voïez comment un coeur va plus loin qu'il ne croit,
Comment il eft mené par un Amant adroit,
Quels pieges tend l'Amour à ce qui vous reffemble;
Ce n'eft pas mon deffein que votre coeur en trem-
ble,

Ni qu'à vos jeunes ans ces pieges prefentez,
Avec un trifte foient toûjours évitez.

Ce n'eft pas mon deffein non plus de vous les pein-
dre

Si charmans, que jamais vous ne les puiffiez craindre,

Ils ont quelque péril, je ne deguile rien

Et que prétens-je done? je ne le fai pas bien,

Fontenelle..

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Dans

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